Baromètre de l’éducation Apprentis d’Auteuil 2023
Pour sa 4e édition, le Baromètre de l’éducation d’Apprentis d’Auteuil réalisé par l’institut de sondage OpinionWay se penche sur la vie affective, relationnelle et sexuelle des 16-20 ans partagés entre leurs aspirations profondes, leurs perceptions et leur réalité émaillée de violences sexistes et sexuelles. Devant ces résultats, il est urgent d’agir. Apprentis d’Auteuil partage à cette occasion son dispositif éducatif - l’Éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle (EARS) - déployé dans ses établissements, pour aider les jeunes à se mieux connaître, à faire des choix libres et responsables. Au final, grandir et s’épanouir pleinement.
Oui, les 16-20 ans veulent une vie affective et sexuelle épanouie. Oui, ils considèrent le bonheur comme un idéal accessible. Pourtant, le sondage d'OpinionWay réalisé pour le 4e Baromètre de l’éducation d’Apprentis d’Auteuil montre une tout autre réalité.
Peu ou mal informés sur les questions affectives, relationelles et sexuelles, les jeunes cherchent des réponses essentiellement auprès de leurs proches ou de leurs amis. Leur notion du consentement est pour le moins floue, avec des différences notables qu’on soit fille ou garçon.
Leur vie sociale et amoureuse est fortement impactée par les réseaux sociaux. Ils sont également exposés aux vidéos pornographiques (60% avant 15 ans) dont les modèles véhiculent des violences sexistes et sexuelles. 55% des filles et 20% des garçons ont subi au moins une violence sexuelle ou sexiste de la part d’un autre jeune. Des chiffres dont l'ampleur est choquante. Ils sont inacceptables. Découvrez tous les résultats de ce sondage.
Les relations affectives, amoureuses et sexuelles des jeunes : des chiffres édifiants
- 55% des jeunes interrogés ont eu leur première relation sexuelle à 16 ans
- 63% des jeunes s’informent sur les relations sexuelles auprès de leur cercle proche
- 60% des jeunes ont été exposés pour la première fois à de la pornographie avant 15 ans
- 37% des jeunes ont subi au moins une violence sexuelle ou sexiste de la part d’autres jeunes (20% des garçons - 55% de filles)
- 57% d’entre eux n’ont parlé à personne de ces violences subies, ou l’ont fait, mais ne se sont pas sentis soutenus
- 82% des jeunes n’ont pas eu de séances d’EARS à l’école élémentaire, 37% au collège et 46% au lycée
Source : sondage OpinionWay pour le Baromètre de l'éducation d'Apprentis d'Auteuil 2023
Des relations affectives entre idéaux et contrôle
Comme le révèle le sondage, les jeunes plébiscitent dans leur grande majorité les notions de fidélité et de confiance. Une relation amoureuse est épanouissante pour les jeunes lorsqu’elle repose sur de la fidélité (89%) et de la confiance (71%).
Pourtant, cette confiance affichée s’accompagne parfois du contrôle de l’autre et d’une certaine forme de violence relationnelle : 25% des jeunes trouvent normal de regarder les messages et les applications mobiles de leur partenaire, sans lui demander son autorisation. 29%, de lui dire à quelle heure il ou elle doit rentrer. 50% pensent que la jalousie est une preuve d’amour.
Une notion floue du consentement
La notion du consentement est au cœur des problématiques. 37% des filles pensent qu’il est difficile de dire non à une relation sexuelle dont elles n’ont plus envie, contre 28% des garçons, ce qui interroge, en creux, le sentiment d’obligation plus répandu chez les jeunes filles. 40% des garçons pensent qu’un acte sexuel amorcé doit aller à son terme, contre 22% des filles. 28% des garçons pensent qu’on doit accepter une relation sexuelle dans le couple à chaque fois que l’autre a envie, contre 12% des filles.
Autre élément qui interpelle, l’interprétation du consentement s’appuyant uniquement sur des éléments de contexte : 38% des garçons et 22% des filles estiment qu’une certaine façon de s’habiller, de se parfumer, de se maquiller ou qu’être invité à regarder Netflix ensemble donnent des signaux positifs d’une envie de relation sexuelle.
L’éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle à Apprentis d’Auteuil
Pour Apprentis d’Auteuil, l’éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle est un enjeu éducatif et sociétal majeur. « Ces résultats ne peuvent nous laisser indifférents, souligne André Altmeyer, directeur de la Stratégie. Il y a urgence à accompagner les jeunes en matière d’éducation à la vie affective, amoureuse, relationnelle et sexuelle, au-delà des inquiétudes et des polémiques qu’elle peut générer. » L’EARS offre le temps d’éduquer les jeunes au consentement, en prenant en compte l’écoute de soi, le respect de l’autre, la compréhension du consentement sexuel libre et éclairé.
À la Maison d’enfants Jean-Bosco, au Havre, c’est un binôme - une psychologue clinicienne et une animatrice pastorale - qui porte l’EARS et mène un travail tout en délicatesse dans l’écoute et l’accompagnement des adolescents. Pour leur permettre de devenir des adultes capables d’aimer l’autre, de le respecter, et de se respecter eux-mêmes.
La pornographie et son influence sur les représentations des jeunes
Autre chapitre important du sondage, l’exposition à la pornographie. 62% des garçons et 43% des filles regardent du porno au moins une fois tous les 2-3 mois, sur des sites Internet et des vidéos où les pulsions règnent, la sexualité est performance et le viol érotisé. 42% des garçons regardent du porno pour en savoir plus sur le sexe, contre 29% pour les filles. 31% stressent à l’idée de pas être à la hauteur de ce qui se fait dans ces films.
Pour 26%, la pornographie ne représente pas souvent une image dégradante des jeunes dans leur sexualité. 27% des garçons contre 13% des filles estiment ne pas pouvoir s’en passer dans leur vie. Conséquence, entre autres, de l’exposition au porno ? Pour 29% des garçons, les filles peuvent aimer être forcées dans le cadre d’une relation sexuelle, 15% pensent également qu’une fille qui dit « non » peut vouloir dire « oui ».
Un niveau de violences sexistes et sexuelles entre jeunes inacceptable
Le sondage explore ensuite les situations de violences que les jeunes ont subi de la part d’autres jeunes. 42% des filles (contre 11% des garçons) ont vécu du sexisme, 28% des filles et 7% des garçons des agressions sexuelles autre qu’un viol, 11% des filles et 6% des garçons, un viol.
Des chiffres en net augmentation quand il s’agit de jeunes gays, lesbiennes ou bisexuels. Pour ces victimes, rompre le silence est encore tabou : 31% n’en ont pas parlé. 26% l’ont fait sans recevoir de soutien. Soit 57% des jeunes laissés seuls avec leur souffrance.
Observatoire des incidents d'Apprentis d'Auteuil
Pour prévenir et réduire les phénomènes de violence, Apprentis d’Auteuil a mis en place en 2001 un Observatoire des incidents, accidents et infractions graves (OIAIG) pour ses 400 établissements et dispositifs. Son objectif ? Prévenir, recenser, signaler les incidents et accompagner les cas de violences graves contre les jeunes. Lorsque la violence survient, la fondation soutient les garçons et les filles au niveau psychologique et judiciaire.
L’EARS et les jeunes : des attentes légitimes à combler
En France, la loi du 4 juillet 2001 rend obligatoire l’instauration de trois séances d’EARS par an dans les parcours scolaires, adaptées à l’âge et à la classe du jeune, du CP à la terminale. Résultat du sondage ? Les jeunes déclarent avoir en moyenne bénéficié de 3,2 séances, bien loin des 36 exigées par la loi. Cette lacune prive les jeunes d’une véritable information et de la prévention nécessaire sur ces sujets. Elle empêche d’aborder toutes les dimensions et tous les enjeux de la relation affective, amoureuse et sexuelle, alors que c’est un défi éducatif majeur. « Il est aujourd’hui urgent de passer à l’action ! s’insurge André Altmeyer. La loi de 2001 doit être appliquée dans tous les établissements scolaires en France, avec des temps dédiés à l’EARS dès l’élémentaire et en complémentarité avec les parents, dont le rôle est essentiel, et qui, hélas, se sentent souvent démunis lorsqu’il s’agit d’aborder ces sujets avec leur enfant. Mais cela implique une prise de conscience au niveau de l’État et un investissement sur le long terme. Il faut sensibiliser et former des professionnels éducatifs et les professionnels de santé sur toutes les dimensions de l’EARS. »
Même si, pour les collégiens, c’est compliqué d’aller voir un adulte pour parler d’amour et de sexe, je leur recommande de trouver la personne de confiance qui leur correspond : elle pourra les écouter et les accompagner.
Un enjeu éducatif prioritaire
En 2022, Apprentis d’Auteuil avait formulé une proposition aux candidats à l’élection présidentielle dans son livre blanc Prendre le parti des jeunes : systématiser l’EARS dans une volonté d’information, d’éducation et de prévention. En conséquence, l’intégrer dans la formation des professionnels de l’éducation.
En 2023, la fondation tire la sonnette d’alarme :
- la loi doit être appliquée dans tous les établissements scolaires avec des temps dédiés à l’EARS dès l’élémentaire
- l’État doit pleinement se saisir du sujet et investir sur le long terme
- les professionnels de l’éducation et de la santé doivent être sensibilisés et formés à toutes les dimensions de l’EARS
- les communautés éducatives doivent disposer de moyens humains et financiers pour répondre aux besoins des jeunes
- Plus que jamais Apprentis d’Auteuil porte la voix des jeunes, leurs inquiétudes et leurs espoirs.
Des formations dédiées à l'EARS
Depuis près de quinze ans, Apprentis d’Auteuil met en place des séances d’EARS dans ses établissements scolaires, et répond également aux questions des jeunes et à leurs aspirations à des échanges sur des thèmes variés : confiance en soi, respect filles/garçons, préjugés sexistes et sexuels, consentement, orientation sexuelle, prostitution… en plus des questions liées à l’anatomie, à la puberté ou aux infections sexuellement transmissibles.
« Dans un contexte sociétal en pleine transformation, la fondation a permis aux collaborateurs - éducateurs, infirmières, psychologues, etc. - qui portent l’EARS dans les établissements de suivre la formation dédiée : éducateur à la vie, souligne André Altmeyer. Pour que chacun puisse accueillir la parole des jeunes, sans tabou ni jugement et répondre aux différentes missions de l’EARS : les informer avec des éléments fiables et scientifiques, favoriser la réflexion et l’échange entre pairs, faire de la prévention face aux violences sexistes et sexuelles. »
Sondage OpinionWay pour le Baromètre de l'éducation Apprentis d'Auteuil 2023
Réalisée du 22 juin au 10 juillet 2023 à partir d’échantillons représentatifs de la population française (2 148 jeunes âgés de 16 à 20 ans), l’enquête d'OpinionWay pour le Baromètre de l’éducation d’Apprentis d’Auteuil 2023 dresse un état des lieux de l’EARS en France.
Le questionnaire a été élaboré par les équipes de l’institut de sondage en lien avec la direction des Ressources éducatives et Accompagnement métiers de la fondation.
Retrouvez les précédentes éditions du Baromètre de l'éducation d'Apprentis d'Auteuil
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