Nina Métayer dans une cuisine
Société

Nina Métayer, meilleure pâtissière du monde : "La transmission me tient beaucoup à coeur."

À 35 ans, Nina Métayer a été élue meilleure pâtissière du monde 2023. Une belle reconnaissance pour cette jeune pâtissière, entrepreneuse dans l’âme, qui a ouvert en 2020 un concept original de boutique en ligne qui révolutionne la traditionnelle vente de pâtisseries en boutique.

Afficher le résumé facile à lire et à comprendre
A 35 ans, Nina Métayer a été élue meilleure pâtissière du monde.

Comment avez-vous découvert la pâtisserie ?

Au départ, je ne me destinais pas du tout à la pâtisserie. Entre la seconde et la première, je suis partie un an au Mexique pour apprendre l’espagnol. Là-bas, je me suis demandée comment subvenir à mes besoins. À 16 ans, je ne savais pas faire grand-chose, mais tout le monde me demandait si je savais faire du pain. Le pain français est très apprécié au Mexique. Je me suis donc dit que j’allais apprendre à faire du pain pour monter ma boulangerie au Mexique ! À mon retour en France, j’ai passé un bac littéraire, puis un CAP en boulangerie dans l’optique de vendre des viennoiseries pour les hôtels au Mexique. Puis, je suis partie un an en Australie pour apprendre à parler anglais et pour me perfectionner en boulangerie. Ensuite, j’ai rencontré Mathieu qui est devenu mon mari et mon associé. Plutôt que d’aller au Mexique, je suis tombée amoureuse et je suis restée à Paris ! Dans la capitale, aucune boulangerie ne voulait me prendre car, à l’époque, il n’y avait pas beaucoup de filles en boulangerie. Je suis donc entrée à l’école Ferrandi où j’ai fait un apprentissage en pâtisserie pour compléter ma formation en boulangerie. J’ai postulé à l’Hôtel Le Meurice, sous la direction de Yannick Alléno, où j’ai été prise avant même d’obtenir mon CAP ! J’y ai appris la pâtisserie de palace puis, à 25 ans, j’ai eu mon premier poste de cheffe à l’hôtel Raphaël. Ensuite, j’ai été appelée par Jean-François Piège pour son nouvel établissement Le Grand Restaurant.

En 2020, vous avez lancé la Délicatisserie, un concept original de « pâtisserie 100 % digital ». Comment ça fonctionne ?

C’est une boutique en ligne : les clients commandent leurs pâtisseries puis viennent les chercher dans des points de vente. Nous n’avons pas de perte, car nous ne remplissons pas de vitrines et nous n’avons pas de boutique au sens traditionnel. Cela nous permet de mettre plus de valeur dans les produits. Grâce à cette vente à la commande, nous faisons de la pâtisserie, notre vrai métier, plus que de la vente.

Nina Métayer avec les jeunes du lycée Daniel Brottier lors de l’inauguration du nouveau laboratoire de pâtisserie qui porte désormais mon nom.
Nina Métayer avec les jeunes du lycée Daniel Brottier lors d'une Master class (c) Nicolas Pontroue/Apprentis d'Auteuil

C’est important pour vous d’être en circuit court, d’éviter le gaspillage ?

On ne peut pas faire de bons gâteaux avec de mauvais ingrédients. En choisissant un produit, je peux soutenir un artisan qui travaille bien et que j’ai envie de voir grandir. J’achète mes ingrédients à des producteurs qui respectent leurs produits, qui font leur métier avec coeur et passion. Mes clients sont aussi dans cette logique-là. Grâce à la boutique en ligne, on peut faire un produit haut de gamme qui reste accessible.

Il y a peu de cheffes pâtissières connues du grand public. Est-ce un domaine où il est encore difficile de percer pour une femme ?

Oui, mais il y a de plus en plus de jeunes femmes dans les écoles de pâtisserie. Donc les choses vont changer ! Néanmoins, le milieu de la cuisine et de la haute gastronomie est un milieu très exigeant. Il faut une certaine confiance en soi. Et il n’y pas beaucoup d’exemples de cheffes pâtissières pour aider les jeunes femmes à se projeter dans ce métier. Les horaires et les jours de travail (le weekend, pendant les vacances) sont aussi assez contraignants. Il faut donc être bien entourée, notamment lorsqu’on a des enfants.

La transmission est-elle importante dans votre métier ?

C’est le plus important, car notre métier est un métier artisanal qui ne s’apprend pas dans les livres. La transmission du geste, du souci du détail, de la bonne vitesse d’exécution, s’acquiert auprès d’une personne. C’est aussi essentiel pour la pérennité de notre métier. Cela me tient beaucoup à coeur de transmettre et de donner un coup de pouce à des jeunes qui débutent grâce à un mot, un geste, une phrase. C’est la raison pour laquelle j’ai accepté d’inaugurer le nouveau laboratoire de pâtisserie du lycée professionnel Daniel Brottier de Bouguenais qui porte désormais mon nom. C’était la première fois qu’on me faisait cet honneur !

Quelles sont vos créations pour Noël ?

Cette année, nous proposons une buche en forme de flocon de neige à la vanille et à la noix de pécan. Un dessert doux et réconfortant pour réunir tout le monde autour de la table. Notre autre création est en forme de tournesol avec de la poire et du miel pour apporter un peu de soleil en hiver ! Nous avons aussi une buche exotique à la noix de coco avec un insert mangue-passion sur un biscuit croustillant aux amandes.

Comme dans la mode, vos créations d’hiver sont pensées longtemps à l’avance ?

Effectivement, nos créations pour Noël sont élaborées au mois de juillet ! En septembre, nous envoyons déjà à la presse nos visuels de buches et de galettes. En ce moment (l’interview a été réalisée au mois d’octobre, ndlr), nous sommes déjà sur les créations pour Pâques !

Nina Métayer avec les jeunes du lycée Daniel Brottier.
Nina Métayer avec les jeunes du lycée Daniel Brottier lors de l’inauguration du nouveau laboratoire de pâtisserie qui porte désormais mon nom. (c) Nicolas Pontroue/Apprentis d'Auteuil

L’enfance de Nina Métayer

"J’ai eu une enfance heureuse. Je suis née à La Rochelle, mais j’ai grandi à Strasbourg. J’ai deux petites sœurs. Dans ma famille, on ne partait pas beaucoup en vacances, mais tout notre budget passait dans la nourriture. Ma mère était journaliste et mon père développeur web, donc pas du tout issus de la gastronomie. Mais la cuisine nous a toujours réunis. Les repas étaient des moments sacralisés. Ma culture des bonnes choses et des bons produits vient donc de là.

À l’école, j’avais un peu de mal à me concentrer. J’étais toujours un peu trop bavarde, un peu trop dissipée... J’ai fait du piano et du théâtre, mais je n’étais pas très bonne même si j’étais passionnée. Je n’avais pas encore trouvé mon truc. Lorsque j’ai découvert la pâtisserie, j’ai pris confiance en moi et je me suis donnée les moyens d’y arriver. Il faut savoir persévérer. La volonté emmène plus loin que les compétences, car les compétences peuvent s’acquérir. La volonté est la chose la plus précieuse que l’on peut avoir."

Les moments clés

  • 2 mai 1988 Naissance à La Rochelle
  • 2011 Apprentissage de la pâtisserie à l’école Ferrandi
  • 2011 Entre à l’hôtel Meurice sous la direction de Yannick Alléno
  • 2014 Devient cheffe pâtissière à l’hôtel Raphaël
  • 2015 Création de la carte des desserts pour le Grand Restaurant de Jean-François Piège
  • 2020 Lancement de la Délicatisserie
  • 2021 Publication de La délicate Pâtisserie aux éditions La Martinière
  • 2023 Elue meilleure pâtissière du monde