Dispositif Le bus des possibles à Brignoles - un booster territorial discute avec des jeunes
Formation et insertion
19 août 2025

Comment toucher les publics les plus isolés ?

Depuis plusieurs années, Apprentis d’Auteuil a fait de « l’aller vers » une des priorités de sa politique d’insertion. Pourquoi ? Comment ? Les explications de Pascale Lemaire-Toquec, responsable de la direction Ressources éducatives études et Accompagnement métiers. 

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Comment Apprentis d'Auteuil va à la rencontre des jeunes isolés pour les accompagner vers une formation ou un emploi ?

Qu’est-ce que « l’aller vers » ?

C’est une démarche qui consiste à aller à la rencontre de personnes éloignées de l’emploi ou de l’insertion, que l’on ne parvient pas à toucher si l’on se contente de rester derrière un bureau en attendant qu’elles viennent vers nous. Cela concerne des jeunes ou des familles qui ne savent pas comment faire pour être accompagnés ou qui ne demandent pas les prestations sociales auxquelles ils et elles ont droit. Parmi les jeunes ni en emploi, ni en formation (NEETS), qui représentent 12% des 16-29 ans, certains ne sortent plus de chez eux, restent dans leur quartier, dans leur environnement très proche. Ils n’ont plus confiance dans les institutions qui sont censées les aider. Ils ont aussi beaucoup de mal à effectuer des démarches administratives et tout ce qui est formel. Aller vers eux, dans une démarche informelle, permet de créer une relation de confiance et de leur montrer qu’il est possible d’être accompagné autrement. 

Est-ce une démarche nouvelle ?

Cette tendance du secteur social existe depuis longtemps et est revenue en force sur le devant de la scène ces dernières années, car de plus en plus de jeunes décrocheurs ou de jeunes NEETS deviennent "invisibles" des politiques publiques. Les acteurs de l’insertion, dont Apprentis d’Auteuil, n’arrivaient plus non plus à toucher ces populations. Nous avons donc fait de « l’aller vers » une des priorités de notre politique d’insertion pour ne pas laisser ces jeunes au bord de la route. Le but est de leur donner envie d’être accompagnés et de construire un projet ensemble. 

Nous avons dû innover, inventer d’autres manières de toucher les jeunes là où ils se trouvent : aller à leur rencontre sur le terrain, dans les quartiers, frapper à toutes les portes dans une barre d’immeuble, mettre en place des bus pour aller dans les zones rurales reculées. Les professionnels ont dû adapter leurs méthodes de travail : s’associer avec des partenaires de l’action sociale, communiquer sur les réseaux sociaux, créer des événements... Nous travaillons donc en partenariat avec les acteurs de l’insertion au niveau local (France travail, Mission locale, etc.), d’autres associations et bien entendu les entreprises. 

Comment « l’aller-vers » se traduit-il concrètement à la fondation ?

Notre premier dispositif, Impact Jeunes, a démarré en 2017 à Marseille Sa spécificité est d’agir au sein de différents quartiers prioritaires de la ville : nos "boosters d’insertion" vont sonner à toutes les portes d’une barre d’immeubles ou d’un micro-quartier pour toucher les jeunes. À partir de leurs envies, nous construisons un projet qui les ramène soit vers l’école, soit vers l’emploi ou la formation. Depuis, nous avons développé d’autres dispositifs, dont des dispositifs mobiles comme le Bus des possibles, qui va à la rencontre des jeunes dans les zones rurales du Var, ou Potenti’elles, qui s’adresse plus particulièrement aux jeunes filles, dans le Nord-Est. 

Quelles sont les retombées de ces dispositifs ?

Via Impact jeunes, nous avons accompagné 1200 jeunes en 2024 avec un taux de sorties positives de 60 %. Au-delà des chiffres, les effets sont aussi qualitatifs, car ce sont autant de jeunes qui se sont lancés dans un projet, une formation ou une insertion vers l’emploi. Grâce à cette démarche, nous avons touché des jeunes que nous ne touchions plus avec nos dispositifs traditionnels. Ces jeunes nous disent qu’en s’adressant à eux différemment, nous leur avons ouvert le champ des possibles. Mais aujourd’hui, ces dispositifs, mal financés, pourraient rendre à nouveau ces jeunes "invisibles" s’ils venaient à s’arrêter. D’où l’importance de continuer à se mobiliser pour qu’ils continuent à exister.