Education et scolarité

Le service civique séduit de plus en plus de jeunes

Depuis 2015, le nombre de jeunes en service civique a quasiment été multiplié par trois pour atteindre 140 000 jeunes. Un dispositif utile à la fois pour la société et pour certains jeunes volontaires qui y trouvent une occasion unique de rebondir. Explications.

Ils luttent contre le gaspillage dans les cantines, animent des ciné-clubs dans les quartiers ou participent à l'accueil des malades dans les services d'urgence dans les hôpitaux... Ils (ou elles d’ailleurs en majorité), ce sont ces jeunes qui effectuent des missions d'intérêt général en service civique dans une association, une école ou une mairie, à travers tout le territoire. Ces jeunes "héros" du quotidien, âgés de 16 à 25 ans, étaient près de 140 000 en 2018 à agir auprès des français de tous âges, dans des grandes villes, comme dans des zones rurales et même (plus rarement) à l'étranger. En trois ans, leur nombre a presque triplé ! Un véritable engouement pour ce service volontaire créé en 2010 par Martin Hirsch, alors haut-commissaire à la Jeunesse. 

« Un impact indéniable sur la société »

« Depuis 2010, ces volontaires représentent au total une communauté de 370 000 jeunes, explique Béatrice Angrand, qui préside l'Agence du service civique depuis mars dernier. Cette communauté a donc un impact indéniable sur la société française. Près de 30% des missions sont effectuées dans le champ de la solidarité par exemple pour venir en aide aux seniors ou à des familles qui accueillent un enfant handicapé. » Un impact qui change aussi l'image, parfois faussée, que la société française a de sa jeunesse : « On a parfois l’image de jeunes individualistes, qui vivent le nez sur leur portable ou qui sont uniquement préoccupés par leur carrière, poursuit Béatrice Angrand. Le service civique prouve que les jeunes Français sont prêts à donner de leur temps pour s’engager dans des causes ou pour les autres. » D’autant que tous les volontaires ne parviennent pas à trouver une mission. En moyenne, trois jeunes se portent candidats pour une offre de mission. C'est dire l’engouement pour ce service civil et citoyen.

Mission collège

Marie-Adrienne Bouillaud fait partie des heureuses élues. Du mois d’octobre 2018 au mois de mai 2019, cette jeune étudiante de 20 ans, était en mission dans un collège d’Angers. « Je suivais les élèves qui étaient en difficulté dans certaines matières, qui avaient des problèmes de comportement ou qui glissaient vers le décrochage, explique la jeune femme. Ça été une expérience très enrichissante, car je me suis sentie utile. C’est surtout la relation avec les jeunes qui m’a le plus intéressée car souvent on ne parlait pas des notes, mais de leurs difficultés qui pouvaient être personnelles. Ils trouvaient en moi une écoute qui n’existe pas ailleurs dans un établissement scolaire. J’ai aussi été bien intégrée par l’équipe enseignante qui voyait tout l’intérêt de ma mission. Au final, l’expérience du service civique aura été plus positive que je l’imaginais au départ. Cela peut représenter un réel tremplin pour les jeunes. » Voire même révéler des vocations. Car depuis, Marie-Adrienne est retournée à la fac pour préparer les concours pour devenir prof ou conseillère principale d’éducation (CPE).

Haro sur le décrochage scolaire

Le service civique peut aussi représenter une solution pour réconcilier les jeunes avec l’école. C’est le cas de Lavan Natkunam, 25 ans, qui après une mission de huit mois à la Caisse d’allocations familiales (CAF) de Paris a pu rebondir : « Lorsque j’ai commencé ma mission, je sortais de trois années à la fac où j’étais véritablement en situation de décrochage, confie le jeune homme issu d’un quartier prioritaire de la politique de la Ville. Les cours ne m’intéressaient pas, je n’y allais plus d’ailleurs… À la CAF, j’avais pour mission d’aider les allocataires perdus avec l’informatique et je faisais de la prévention contre le cyber-harcèlement et de l’aide aux devoirs pour des jeunes dans deux centres sociaux. Pour la première fois de ma vie, je me suis senti à ma place, on me faisait enfin confiance ! J’ai aussi découvert que l’on pouvait allier le social et l’informatique. Après le service civique, j’ai suivi une formation au GRETA de médiateur numérique. Puis j’ai été accompagné par l’Institut de l’engagement (une association, partenaire du service civique, ndlr). Aujourd’hui, je suis chef de projet numérique chez Simplon où je travaille pour des acteurs de l’économie sociale et solidaire. Je suis la preuve vivante que le service civique peut changer une vie. Grâce à cette expérience, j’ai pu m’en sortir ! »

Un dispositif connu mais pas reconnu

Au-delà des témoignages élogieux de ses volontaires, le service civique doit maintenant œuvrer à sa reconnaissance par la société. Car s’il est bien perçu par près de 9 Français sur 10, comme l’indique le baromètre du service civique, 73% des plus de 26 ans estiment qu’il n’est pas assez reconnu par le système éducatif et 82% d’entre eux, méconnu des entreprises ! Un défi à relever alors que ce service citoyen, qui deviendra à terme une des modalités du Service national universel, fêtera ses dix ans l’année prochaine.

Deux questions à Béatrice Angrand, présidente de l'Agence du service civique

Comment expliquez-vous l’engouement pour le service civique ?
Nous avons une jeunesse plus engagée car, toutes les études le montrent, elle est en quête de sens. Désormais, 43% des jeunes volontaires font leur service civique juste après le bac. Le service civique est donc un levier extraordinaire pour leur permettre de réfléchir à leur orientation, à leur futur métier, mais aussi pour prendre conscience de qui ils sont et ce qu’ils veulent faire dans la vie. Cela en fait une expérience assez unique. Le service civique bénéficie d’une très grande notoriété auprès des jeunes, il suscite donc naturellement d’autres vocations.

Quelles sont vos priorités ?
Le nombre de volontaires a fortement augmenté depuis 2015. Au-delà du nombre, ce qui est important c'est de préserver la qualité des missions proposées aux jeunes, de garantir leurs droits. Nous avons aussi pour ambition de favoriser la mixité sociale en touchant aussi les jeunes éloignés de ce programme : ceux qui habitent dans les quartiers prioritaires de la politique de la Ville, en zone rurale, qui sont en situation de handicap ou de décrochage scolaire, car on voit les effets bénéfiques du service civique sur ces publics fragiles. Si les missions sont qualitatives, les effets en sont décuplés.

Le service civique à Apprentis d'Auteuil

En 2018, la fondation a accueilli 109 volontaires en service civique. La plupart (74%) ont accompagné des jeunes au quotidien dans les établissements : internat, soutien scolaire, activités sportives ou culturelles. Les jeunes volontaires ont également accompagné les jeunes vers leur insertion sociale et professionnelle : écoute, rédaction de CV et de lettres de motivation.