jeune enfant dans les bras de sa mère
Accompagnement des parents
06 décembre 2021

Pour les tout-petits, des parents soutenus et accompagnés

Engagé auprès de l’enfance et de la jeunesse en difficulté depuis plus de 150 ans, Apprentis d’Auteuil mène également des actions aux côtés des familles fragilisées dans leur parcours de vie. L’enjeu est de prévenir d’éventuelles difficultés en accompagnant en amont les parents dans leur rôle éducatif. Et de les sensibiliser aux besoins des tout-petits. Explications.

Une maison, au cœur de Mulhouse, comme tant d’autres dans ce quartier situé à l’est du centre historique. C’est là que viennent, du lundi au jeudi, des familles de tous horizons. 90 parents et 220 enfants fréquentent à l’année ce lieu d’écoute et de partage. Le succès est au rendez-vous. Xaverie, maman de trois enfants de 3 mois, 3 et 10 ans, est enthousiaste : « À la Maison des familles de Mulhouse, j’apprends des choses que je ne connaissais pas. Que les enfants peuvent s’épanouir à travers le jeu, ou que mon grand peut s’occuper autrement qu’en regardant la télé. Pour mon petit qui a des difficultés à manger et avait tendance à pleurer, j’ai eu des conseils de la puéricultrice pour savoir comment m’y prendre. »
Accompagner les parents dans leur rôle, et particulièrement, auprès des tout-petits, est un axe majeur pour Apprentis d’Auteuil. D’année en année, il s’est renforcé, étoffé, au gré des expériences et des innovations. Les maisons des familles, ouvertes depuis 2009, en sont un exemple. Il faut citer également les crèches, les résidences sociales ou le centre maternel, tous les lieux fréquentés par les parents et leurs enfants.

Des ressources pour les parents

Mimozé et son fils Enuar, à la Maison des familles de Mulhouse (c) David Betzinger/Apprentis d'Auteuil
Mimozé et son fils Enuar, à la Maison des familles de Mulhouse (c) David Betzinger/Apprentis d'Auteuil

« La relation parent-enfant/bébé est centrale dans le projet de l’établissement, détaille Anne-Claire Schneider, la directrice de la Maison des familles de Mulhouse, créée en partenariat avec Caritas Alsace. Nous disposons de différents outils à partager avec les parents (1). » La maison diffuse ainsi des vidéos (2) disponibles en plusieurs langues, sur le développement du nourrisson, le rôle du jeu, le développement du langage, l’éducation sans violence. « Nous les avons utilisées avec un papa sri-lankais, dans sa langue, le tamoul, ce qui lui a permis d’être mieux outillé avec son bébé sur les questions de paternité. » Elle bénéficie également du savoir-faire de l’association 1001 mots qui propose des petits livres destinés aux tout-petits, qui viennent renforcer la relation parent-bébé. 
Offrir toutes les ressources et outils possibles sur le bien-être du bébé et son développement, c’est un objectif crucial pour le centre maternel Samarie, situé à Coulommiers, en Seine-et-Marne. Ce centre parental renforcé accueille des jeunes filles de 14 à 25 ans, enceintes ou avec un enfant de moins de 3 ans, la plupart accueillies au titre de la protection de l’enfance. Il s’agit également de prendre soin de ces très jeunes femmes aux parcours souvent chaotiques.

Une équipe à l'écoute des jeunes mamans et de leurs bébés

« Les premières semaines, voire les premiers mois, selon les besoins, nous accompagnons les mamans dans tous les actes de soin, le change, le bain, le repas, explique Élodie Kolaczyk, cheffe de service. Nous les aidons à soulager les montées de lait, à vérifier que le bébé tête assez, ou à préparer les biberons. Les deux veilleuses de l’équipe de nuit interviennent aussi la nuit, quand les mamans n’arrivent pas à se lever, que leur corps leur fait mal ou qu’elles sont fatiguées. »
Plusieurs fois par semaine, l’auxiliaire de puériculture et l’éducatrice de jeunes enfants animent des ateliers individuels de 30 minutes autour de l’éveil moteur, sensoriel ou musical, de la relaxation ou du massage. Les mamans sont très en demande. Une fois par mois, le centre maternel organise un groupe de parole à thème, par exemple, l’endormissement ou les pleurs du bébé. « L’éducatrice donne des outils, les mamans partagent leur expérience...  Le mois dernier, nous avons invité un pompier pour sensibiliser aux accidents domestiques et aux gestes qui sauvent. »

Encourager les bonnes pratiques

Emilie et Saad jouent ensemble à la crèche Un air de printemps de Marseille (c) Benjamin Béchet/Apprentis d'Auteuil
Emilie et Saad jouent ensemble à la crèche Un air de printemps de Marseille (c) Benjamin Béchet/Apprentis d'Auteuil

Toutes ces actions contribuent à renforcer les connaissances des jeunes mamans et leur confiance dans leur capacité à s’occuper de leur enfant. « S’occuper d’un bébé H24 c’est déjà compliqué quand on est en couple, qu’on a une famille, et qu’on a pris soin de nous quand on était enfant, reconnaît la cheffe de service. Autant de situations que la plupart des jeunes filles que nous accueillons ici ne connaissent pas. C’est à nous de les soutenir et de les accompagner pour leur donner le maximum de clés et leur montrer qu’elles ne sont pas seules avec leur bébé. »
La crèche Un air de printemps, située dans les quartiers nord de Marseille où vivent différentes communautés, accueille des enfants jusqu’à trois ans et accompagne leur famille, souvent touchées par la précarité et les inégalités sociales. Près de la moitié des familles n’ont pas de revenus, et pour près de 70 % d’entre elles, il est inférieur à 1500 € par mois.

Objectif prévention

« Notre priorité est l’intérêt supérieur de l’enfant, souligne Marie-Eve Bujko, la directrice. Notre objectif est, dans les premiers temps, d’instaurer un climat de confiance entre les parents, l’enfant et les professionnels. Le fait de vivre le quotidien avec les mamans et les enfants nous rapproche. Nous entrons dans le cercle familial, notre parole est plus écoutée, nous pouvons faire passer des messages sur l’équilibre alimentaire, l’éducation etc. »
L’établissement met l’accent sur la prévention, en particulier, sur les volets santé et alimentation. Un médecin pédiatre assure des permanences trois fois par mois, suit chaque enfant et partage son savoir avec les mamans.
Rabiata M’Madi, maman de six enfants dont un garçon de 2 ans et demi accueilli à la crèche, se souvient : « C’est ici que ma fille, qui est autiste, a appris à manger seule, à rester assise le temps d’une histoire, à jouer un peu avec les autres. C’est ici aussi que j’ai été alertée par les auxiliaires de puériculture sur l’état de santé de mon fils qui jouait seul, ne buvait que du lait. Aujourd’hui, il commence à jouer avec d’autres, mange seul. Peut s’endormir seul aussi. S’occuper des enfants et accueillir tout le monde, sans exception, est dans le cœur et dans les racines d’Un Air de famille. Ici, on pense et on réfléchit au bien de l’enfant, on se décarcasse pour lui. Je suis en admiration et mes soucis s’envolent ! »

(1)    Programme The Human Safety net de Generali
(2)    Via l’association Papoto : parentalité pour tous. Propose des outils pour les parents défavorisés ou fragilisés.
(3)    Commission des 1000 premiers jours : elle réunit 18 experts de la petite enfance, à la demande du gouvernement, pour lutter contre les inégalités de destin.
ZOOM En 2020
•    Auteuil Petite enfance, filiale d’Apprentis d’Auteuil, a accompagné 1 127 familles.

•    13 Maisons des familles, réparties sur tout le territoire, ont accompagné 2 163 personnes, en majorité des mères isolées.
LE POINT DE VUE DE
Nathalie Casso-Vicarini, déléguée générale de l’association Ensemble pour l’éducation de la petite enfance et membre de la commission des 1000 premiers jours (3)

« L’avenir de l’enfant dépend de ce que le docteur Boris Cyrulnik appelle la niche sensorielle, qui se crée autour de l’enfant bien avant la naissance. Quand le bébé naît, ses parents vont combler tous ses besoins physiques et affectifs : dormir, manger, être changé, regardé, câliné… Tout cela participe à son développement et son épanouissement. L’environnement de l’enfant a bien sûr un impact sur son développement. Plus il existe des facteurs de risque (difficultés familiales, précarité, isolement des parents…), plus les besoins du bébé sont importants, et plus il va falloir mettre en place des facteurs protecteurs (sécurité, estime de soi…). Le cerveau du petit enfant étant malléable, la résilience peut s’opérer, dès lors que l’attachement est ancré.
Je milite pour le développement de la « pair-aidance », un concept existe dans beaucoup de pays, dont l’Australie. Là, les parents intègrent un groupe de parents, des pairs, dès la naissance, et pour une durée d’un an. Cela permet de développer la confiance en soi, s’entraider et nourrir un sentiment d’appartenance à une famille, pour que le bébé puisse s’épanouir. Ces rencontres permettent de rompre l’isolement des jeunes mamans, et de limiter les risques de burn-out parental. »