Vie de la fondation

Un mois pour tout savoir sur l'économie sociale et solidaire

À l'occasion du Mois de l'économie sociale et solidaire (ESS) qui débute le 1er novembre, Hugues Sibille, président du Labo de l'ESS, analyse le poids grandissant de ce secteur qui tente de concilier l'homme et l'économie. Interview : Félix LAVAUX Photo : IstockPhoto

Comment peut-on définir l’économie sociale et solidaire ?

Hugues Sibille, président du Labo de l'ESS

L’économie sociale et solidaire (ESS) est aujourd’hui définie par la loi de 2014. Elle réunit des associations, mutuelles et fondations, ainsi que des sociétés commerciales qui respectent des règles de lucrativité et de gouvernance. C’est une définition juridique. Pour moi, l’ESS se définit par des valeurs humanistes telles que la solidarité - que ce soit avec les exclus dans nos pays, avec les pays du Sud ou avec les générations futures - et la démocratie, en associant les personnes au fonctionnement des organisations. En ESS, on ne fait pas pour, mais avec ! Il faut aussi que les pratiques soient conformes à celles que l’on affiche dans les statuts. L’ESS est donc très concernée par les questions d’évaluation, de mesures d’impact. C’est un domaine passionnant dans lequel j’ai passé quarante ans de ma vie. Je constate d'ailleurs que c’est un secteur qui attire beaucoup les jeunes aujourd’hui, car l’ESS est dans l’économie, mais avec une dimension humaniste.

Comment l’ESS parvient-elle à allier l’économie et le social ?

L’ESS a avant tout une finalité sociale et sociétale qui doit rester première. Pour atteindre cet objectif, les acteurs de l’ESS mettent en œuvre des moyens économiques. Par exemple, une entreprise d’insertion a d'abord pour but d’insérer des personnes avant d’avoir des objectifs économiques. C’est l’économie au service de l’homme et pas l’inverse. Ce qui est une différence fondamentale avec l’entreprise capitaliste classique dont la finalité est d’abord la réussite économique. L’ESS est une utopie car concilier l’économique et le social est un but à atteindre. Mais c’est parce que nous sommes habités par cette utopie que nous arrivons à transformer l’économie classique. L’ESS permet de sortir d’une conception du XXe siècle qui plaçait d’un côté l’économie, le capitalisme et la compétition, et de l'autre, le social, domaine de l’État providence, de la redistribution et des œuvres sociales. Au XXIe siècle, l’ESS cherche à réconcilier ces deux dimensions.

Que pèse aujourd’hui l’ESS dans l’économie ?

L’ESS représente 230 000 entreprises et établissements, 2,3 millions de salariés. Et 10% du PNB. Au sein de l'ESS, le secteur associatif est le plus important, avec environ 1,3 million salariés. Et au sein du secteur associatif, c’est le secteur sanitaire et social qui est le plus représenté.

Comment est né le Mois de l'ESS qui a lieu tous les ans au mois de novembre ?

C'est une initiative des chambres régionales de l'ESS (CRESS) qui souhaitaient donner plus de visibilité aux acteurs de l'ESS. Depuis une dizaine d'années, des colloques, des manifestations, des visites d'entreprises, des débats sont organisés partout en France tout au long du mois de novembre. Depuis, l'ESS a nettement progressé en termes de notoriété et de reconnaissance. Dans un sondage récent, un étudiant des grandes écoles sur deux disait vouloir travailler dans le secteur de l'ESS. Ce qui était impensable il y a une quinzaine d'années !

Quel est le rôle du Labo de l'ESS  que vous présidez ?

C'est un think tank, une boîte à idées en français, créée en 2010 pour représenter le monde de l'ESS. Il a comme particularité de partir d'expériences du terrain qui ont fait leurs preuves pour les modéliser. Nous avons par exemple travaillé sur les circuits courts, la transition énergétique et citoyenne, les nouvelles formes d'emploi... Nous travaillons à la transformation de la société et à des enjeux aussi différents que ceux de la santé ou des migrants.