Jean-Paul Lichtlé, animateur en pastorale : « Les jeunes d'Apprentis d'Auteuil sont la trace de Dieu dans ma vie »

 « Partir en pèlerinage avec la grande famille d'Apprentis d’Auteuil, c’est s’engager dans une aventure humaine et spirituelle incomparable, avec la garantie de tisser des liens forts et de partager des moments intenses »  raconte, enthousiaste, Jean-Paul Lichtlé, animateur en pastorale au campus Saint-Antoine de Marcoussis, dans l'Essonne, interrogé quelques jours avant son départ pour Lourdes. 

Au total, ils seront 4 500 jeunes et adultes, venus de tous les établissements de la fondation, à se retrouver sur les bords du Gave. Jean-Paul Lichtlé, lui, part avec 50 adolescents, dont un tiers de nouveaux, douze anciens... et une maman, ravie de vivre cette expérience unique à leurs côtés.

Si les motivations des jeunes du campus ne sont pas toutes les mêmes - passer un bon moment avec ses copains de lycée, partir poussé par ses grands-parents croyants ou profiter de cette occasion pour approfondir sa foi dans un haut lieu de la tradition chrétienne - tous sont pressés de vivre cet événement qui s’annonce. 

Un temps fort inoubliable où chacun trouvera sa place, animé par le désir de s’ouvrir, d’échanger et de grandir ensemble. Et pour Jean-Paul Lichtlé, un défi qu’il accueille avec la conviction qui l’anime depuis toujours : accompagner les jeunes dans leur parcours, en leur offrant un espace de confiance, de partage et d’espérance.

Penser et agir ensemble

Ce matin, dans l’Essonne, un grand soleil éclaire l’ancien corps de ferme du château de Marcoussis. Transformé en aumônerie, le bâtiment est situé juste derrière les ateliers du lycée horticole. Dans ce lieu un peu à l’écart, avec ses murs en crépi, ses pans de bois et son joyeux désordre, les jeunes peuvent venir de manière très libre tout au long de la semaine pour échanger, partager sur les textes sacrés, prier, jouer... Ou tout simplement se poser. 

« Apprentis d’Auteuil, glisse encore Jean-Paul, est une œuvre d’Église, mais la pastorale telle que nous la concevons dépasse l’enseignement de la foi chrétienne. Quand nous accompagnons un jeune dans nos aumôneries, nous voulons avant tout lui faire comprendre qu’il est attendu, lui offrir l’occasion d’être écouté et lui permettre de vivre la fraternité. » 

Une mission qui, conformément à l’orientation pastorale « Choisir d'aimer », récemment repensée avec des jeunes et des familles, passe par des activités, des projets et des animations visant le développement de la personne dans toutes ses dimensions. Sur le terrain, les animateurs pastoraux travaillent au quotidien en lien avec les équipes éducatives et pédagogiques, dans la dynamique du « Penser et agir ensemble » d'Apprentis d'Auteuil. 

Capables du meilleur

Au fil des jours, sur le campus, Jean-Paul propose des partages d'Évangile, organise des animations lors des fêtes religieuses, invite les jeunes à s’engager, les ouvre à l’interreligieux, les emmène à Lourdes avec le diocèse, participe aux réunions de direction du lycée...

Il prépare aussi ceux qui le souhaitent aux sacrements de la foi chrétienne et se rend disponible pour des échanges plus personnels. « Être animateur en pastorale, insiste-t-il, c’est permettre aux adolescents de découvrir - ou d'approfondir - une façon d’être au monde qui, par la grâce de Dieu, peut changer profondément leur vie. »

Et l'animateur d'évoquer, à l'appui, les séjours qu'il propose tous les ans, au printemps, dans la cité mariale,, aux jeunes prêts à se mettre au service des malades.  Une démarche qui complète celle du pèlerinage national qui donne lieu à de vraies prises de conscience. « Ces adolescents des quartiers me surprennent à chaque fois de la même façon. Ils arrivent souvent agités et centrés sur eux-mêmes. Puis, au contact des malades, tout bascule : ils deviennent attentifs, souriants, ponctuels. Et découvrent la joie de se dooner aux autres. De vrais bénévoles, qui redonnent de l’élan aux équipes. »  

Il poursuit. « Mis en confiance, les jeunes se révèlent capables du meilleur. Ils ont en eux des ressources insoupçonnées. »    

La pédagogie de la confiance

Cette pédagogie de la confiance, Jean-Paul, dernier d’une fratrie de cinq garçons, la tient de ses années d’enfance à Soultzmatt, village alsacien de la route des vins, au sein d’une famille ouverte aux autres et enracinée dans la prière.

Après son baccalauréat, le jeune homme choisit la vie religieuse et rejoint les Spiritains. Sa formation l’amène notamment jusqu’au nord du Cameroun, pour un stage effectué avec la « bénédiction » de deux de ses grands frères déjà engagés comme prêtres missionnaires, eux aussi chez les Spiritains. 

Des mois de mission passionnants, passés à enseigner, bricoler, creuser des puits, découvrir la vie communautaire en brousse ou encore accompagner des sœurs infirmières en tournée. Ils marquent profondément Jean-Paul.

Pourtant, à son retour, après ses premiers vœux, le novice réalise – à l’issue d’un temps de discernement – que la vie religieuse n’est pas son chemin. « J’ai compris que  je n'étais pas fait pour ce modèle de vie  », confie-t-il sobrement.

Mais l’appel à la rencontre et à l’engagement, en particulier auprès des jeunes, est toujours présent. Presque naturellement, Jean-Paul rejoint Apprentis d’Auteuil, d’abord comme éducateur, puis comme animateur en pastorale aux établissements Saint-Philippe. Il se marie quelques années plus tard. Deux enfants adoptés viennent rejoindre le foyer.

Dans la simplicité

Aujourd’hui, après des années de service en région parisienne, aux établissements Saint-Philippe (Meudon), Saint-Gabriel (Bagneux), puis Saint-Antoine, Jean-Paul a toujours l’espérance chevillée au corps. « Les jeunes d'Apprentis d'Auteuil sont la trace  de Dieu dans ma vie », confie-t-il avec émotion. 

À l’image de François Libermann, grande figure spiritaine, un de ses maîtres spirituels qu’il redécouvre depuis qu’il chemine aux côtés des associés spiritains (voir encadré), il veut vivre comme le grand frère qui va à la rencontre de ceux que Dieu met sur son chemin.

D’ailleurs, à Saint-Antoine, beaucoup de jeunes - et d’adultes - l’appellent « mon frère ». Cette simplicité lui va bien. C’est aussi sa manière d’apporter le Christ à ceux qu’il côtoie, dans un contexte d’Église et de société de plus en plus compliqué. 

« Notre monde change. On entend de plus en plus parler de violence et de réseaux sociaux qui déshumanisent. Pas question pour moi, de céder pour autant au pessimisme. Les jeunes en difficulté nous montrent la voie. Avec eux, on peut inventer d’autres façons de vivre ensemble », glisse ce fan d’écologie intégrale qui, pour se détendre, fait pousser ses légumes dans un potager partagé. « Rien ne me fait plus de bien que de sarcler et de cultiver. La nature est belle. Dans une vie pas toujours simple, c’est mon équilibre. »