Bérengère Mazerbourg, animatrice en pastorale : « Noël, c’est la joie simple d’une humanité partagée. »
En ces jours qui précèdent la fête de Noël, l’engagement des équipes éducatives d’Apprentis d’Auteuil prend un relief particulier. Échange avec Bérengère Mazerbourg, animatrice en pastorale auprès de jeunes en Maison d’enfants et de mineurs non accompagnés.
Que représente Noël pour vous ?
L’espérance, la famille, la joie simple de se savoir aimé, accueilli et relié à ceux qui nous entourent.
Cette fête me parle aussi de ma propre naissance, en lien avec Dieu qui a choisi de se faire humble. Dans ce mystère de simplicité et de renouveau, je perçois un appel à redevenir moi aussi humble, à accueillir ma fragilité comme un lieu de rencontre avec l’autre et avec le divin.
Fêter Noël, pour moi, c’est retrouver l’enfant présent en chacun de nous : celui qui sait encore s’émerveiller, se laisser toucher, oser la vulnérabilité et rejoindre l’autre dans ce qu'il a de plus vrai.
Alors, de cette ouverture naît quelque chose de nouveau. Un élan s’esquisse, fait de tendresse et de confiance...
Y a-t-il un souvenir autour de Noël vécu avec les jeunes qui vous touche particulièrement ?
Je pense à cet ado avec lequel nous étions partis marcher en pèlerinage à la Sainte-Baume il n'y pas si longtemps. Il avait du mal à avancer et à se plier aux règles, son quotidien était compliqué et toute l’équipe était inquiète pour lui. Arrivé à la grotte de sainte Marie-Madeleine, il a établi des liens entre sa vie et sa foi, en découvrant des représentations de Jésus et de Marie. Visiblement marqué, il s'est ouvert et nous avons beaucoup échangé.
Cette démarche vécue en groupe et dans la prière a été une étape dans son chemin de reconstruction. Aujourd’hui, il est en apprentissage dans la restauration et devient un homme debout. Son parcours m’a profondément touchée. Noël, c’est aussi cela : ces moments où une vie peut repartir autrement.
Qu’essayez-vous de transmettre aux enfants en cette période de l’année ?
Que ce soit à la maison d’enfants ou auprès des jeunes mineurs non accompagnés, nous faisons tout, avec les éducateurs et les bénévoles, pour offrir aux jeunes un espace où ils se sentent entourés. À cette période, beaucoup ressentent plus fortement l’absence d’un repère affectif stable.
À travers des temps d’échange et des ateliers, nous leur donnons de vivre Noël comme une expérience de rencontre et de lumière, une parenthèse où ils se découvrent attendus et importants. Ils en sont tous très touchés.
Comment procédez-vous ?
Nous leur proposons des ateliers créatifs, d’expression ou de parole, la décoration du sapin, des temps de partage autour des relations et de la confiance.
Nous leur parlons aussi de la crèche, des traditions de Noël et de ce qui donne sens à cette fête, tout en leur offrant écoute et disponibilité. Peu à peu, ces échanges révèlent que nous aspirons tous, au fond, à la même chose : une soif de plénitude, de joie, de relations vraies.
Pour célébrer Noël, nous organisons également une journée dédiée, marquée par un repas festif, un temps de fête partagé, un spectacle préparé par les plus jeunes et, bien entendu, une célébration religieuse ouverte à tous, autour de l’enfant de la crèche.
Et sur un plan plus intérieur ?
Nous invitons ceux qui le souhaitent à des moments de silence pour découvrir leur intériorité. À travers un court temps de méditation, un chant, une prière proposée à ceux qui le désirent, ils font l’expérience concrète de la paix du cœur. Et, pour certains, de la présence au fond d'eux-mêmes d'un Dieu proche qui les aime d'un amour infini.
Quel message plus personnel portez‑vous à leur intention ?
Au cœur de ce que je vis avec eux, il y a cette conviction que Dieu les a rêvés avant leur naissance. Leur existence n’est pas un hasard ni un accident. Leur fragilité, ce qu’ils vivent de plus blessé, peut devenir un lieu saint où Dieu se rend présent.
À Noël, c’est Lui qui vient à leur rencontre, là où ils en sont, avec leurs questions, leurs colères, leur foi naissante parfois. Qu’ils soient sans religion, chrétiens, musulmans, en recherche ou même en révolte contre Dieu, chacun est rejoint tel qu’il est.
En quoi ces temps vécus avec les jeunes font-ils grandir votre espérance ?
Par leur présence, les jeunes d’Auteuil m’apprennent à aimer l’autre plus en vérité, tel qu’il est, dans sa fragilité et dans sa beauté. Chaque rencontre avec eux m’invite à grandir dans cette tendresse vraie, sans conditions. Comme un chemin d’humanité partagée.
Une animatrice au cœur de la rencontre et du partage
Infirmière puéricultrice de formation, Bérengère Mazerbourg exerce pour la sixième année comme animatrice en pastorale à la Maison d’enfants La Valbourdine de Toulon et à L’Escale Saint-Elme toute proche (à La Seyne-sur-Mer), un lieu ouvert en 2020 par la fondation pour accueillir des jeunes migrants.
Chargée d’animer la vie spirituelle et chrétienne au sein de ces deux établissements, elle propose tout au long de l’année des activités pour éveiller et faire grandir la spiritualité des jeunes, sans oublier les adultes : temps d’échange, ateliers, actions de solidarité, sorties, temps de méditation, mais aussi pèlerinages, camps et, chaque été, une semaine de marche sur les chemins de Compostelle.
Avec l’aide de bénévoles, elle accompagne également ceux qui le souhaitent sur le chemin plus spécifique de la foi chrétienne (préparation aux sacrements, participation à des célébrations, etc.), tout en favorisant le dialogue interreligieux, notamment avec les musulmans, afin que chacun se sente respecté dans ses convictions et accueilli tel qu’il est.
Avant de revenir habiter à Toulon, où se trouvent ses racines familiales, elle a passé près de vingt ans au Canada avec son mari et leurs quatre enfants, où elle a travaillé comme éducatrice dans un centre parental.
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