Témoignages

Aumônier à Apprentis d'Auteuil, Benjamin Sanon témoigne

Dans son message pour le dimanche 22 octobre, Journée Missionnaire Mondiale, le pape François rappelle que la mission, tâche centrale de l’Église, trouve son fondement dans celle du Christ : annoncer la Bonne Nouvelle. En écho, le père Benjamin Sanon, spiritain, évoque sa mission au sein d’Apprentis d’Auteuil, comme aumônier en PACA.

Vocation

Le père Benjamin Sanon avec les mamans et les enfants de la crèche Un Air de famille, à Marseille (c) JP Pouteau/Apprentis d'Auteuil
Le père Benjamin Sanon avec les mamans et les enfants de la crèche Un Air de famille, à Marseille (c) JP Pouteau/Apprentis d'Auteuil

Dans mon diocèse en Centrafrique, le témoignage missionnaire des Spiritains vécu dans la simplicité et l’accueil, leur présence auprès des gens, leur engagement pour les pauvres et leur respect de la culture m’a profondément marqué quand j’étais enfant. D’abord missionnaires, ils témoignent de l’évangile également de cette manière. En 2002, à 21 ans, j’ai rejoint la congrégation du Saint-Esprit et j’ai suivi une formation à Bangui d’abord, puis au Gabon, au Cameroun, au Congo Brazzaville et enfin en 2008 chez les Jésuites, au Centre Sèvres, à Paris. J’ai été ordonné prêtre en 2012 et affecté à Apprentis d’Auteuil en PACA.

Le défi de la rencontre

À Apprentis d’Auteuil, j’ai découvert un lieu professionnel avec des codes précis et des réalités différentes d’un établissement à l’autre. Le défi de la rencontre s’est immédiatement présenté, car on ne vous attend pas nécessairement en tant que prêtre pour venir parler de Dieu. « Alors, qu’est-ce que tu fais ? », me demande-t-on parfois. Je suis un "témoin de la Bonne Nouvelle" ! L’aumônier assure une présence spiritaine, d’Église, auprès de l’ensemble de la communauté éducative, du directeur jusqu’à l’enfant qui vient d’arriver. Une présence gratuite : partager la vie, écouter les joies, les doutes… En définitive, je suis venu à Apprentis d’Auteuil pour vivre ma foi avec les gens, guidé par une parole du père Libermann, notre fondateur : « Il faut en général affectionner tous les hommes, quel que soit leur sentiment sur les principes religieux et sur vous-mêmes. Il faut, de plus, leur laisser toute liberté de penser et d’agir comme ils voudront. »

Notre mission première

Les jeunes accueillis à Apprentis d’Auteuil ont des problématiques différentes mais tous ont le désir de réussir leur vie et de se donner pour les autres, parfois aux dépens d’eux-mêmes. Notre mission première est de porter toute la fondation, et en particulier les jeunes, dans la prière. De leur faire confiance, de voir leur potentiel, de savoir qu’ils arriveront, avec la grâce de Dieu, à faire quelque chose de leur vie. Dans les établissements, je n’ai pas de bureau. Je vais dans les écoles, les lieux de vie. Je partage un repas en Mecs, je passe dans les FJT à l’heure où les jeunes reviennent du travail, dans la maison des familles, la résidence sociale, les crèches… Je suis aux côtés des éducateurs dans ce qu’ils vivent et dans certaines des activités en direction des jeunes ; avec eux, je propose par exemple des actions de solidarité comme la distribution de soupe, ou des soirées sur le thème de l’interculturalité.
Accompagner les adultes, c’est être à leur côté, écouter les doutes, répondre si c’est possible aux questions, réfléchir ensemble sur les thèmes du moment, comme la nouvelle organisation. Et parfois être pris au vif comme prêtre spiritain ‘‘représentant de la tutelle’’ (voir encadré ci-dessous).

Une expérience m’a particulièrement marqué : lors d’un pèlerinage à Notre-Dame-du-Laus (06), un jeune musulman est entré au confessionnal où j’étais. Je lui ai partagé mon étonnement de sa venue. « Mais est-ce que toi, tu es là pour Dieu ? » m’a-t-il-dit. « Oui, bien sûr », lui ai-je répondu… « Alors, en te parlant à toi, ici, je suis venu parler à Dieu pour qu’Il puisse m’aider dans ma vie. » Parfois, nos prudences nous empêchent de rencontrer les gens en toute simplicité. Au-delà des religions, il y a la personne, et pour nous, chrétiens, Dieu lui-même est devenu homme pour nous montrer que dans l’homme, il y a quelque chose de sacré.

Le père Brottier

Le père Brottier est pour moi, une figure de confiance, de courage et de résistance. C’est aussi un homme révolté contre l’injustice et la misère que vivent les gens. Avec ses forces, sa disponibilité à l’Esprit Saint et son "abandon à la Providence", comme il dit, il est capable de s’engager dans des situations où l’homme est complètement à terre. Il fait tellement confiance à Dieu et à l’homme qu’il est porteur de l’âme d’Apprentis d’Auteuil aujourd’hui : faire confiance.

Je suis heureux de vivre ce ministère à Apprentis d’Auteuil. Il m’a ouvert à une autre façon d’être prêtre : ne pas travailler en solo, mais entrer dans les projets des autres et dans leur vision des choses qui peut être différente de la mienne en tant que prêtre. Si un jour, je travaille ailleurs, ce qu’Apprentis d’Auteuil m’a apporté changera ma manière d’être présent aux gens.

Apprentis d'Auteuil et la congrégation du Saint-Esprit

Apprentis d'Auteuil est une oeuvre catholique d'éducation de l'archevêché de Paris, et placée par lui sous la tutelle canonique, pastorale et spirituelle de la province de France de la congrégation du Saint-Esprit. Celle-ci assure la responsabilité qui lui est ainsi confiée dans le respect de l'autorité pastorale de l'archevêque et de chaque évêque dans son diocèse. Plus de 600 spiritains y ont œuvré, dont treize actuellement. Le provincial des Spiritains, Marc Botzung, est membre du conseil d’administration d’Apprentis d’Auteuil. Xavier Lepin, également spiritain, est délégué général de la tutelle et à la pastorale, membre de la direction générale de la fondation. Comme Benjamin Sanon, les aumôniers oeuvrent en région et dans les établissements.
« Si nous sommes à Apprentis d’Auteuil, c’est pour l’annonce de la Bonne Nouvelle au pauvre. Tout part de là et y revient !  a souligné Marc Botzung, à l'occasion des 150 ans d'Apprentis d'Auteuil en 2016. La fondation est concrètement en prise avec la pauvreté humaine. Son projet est social, mais aussi évangélique, parce qu’il s’agit de la dignité de l’homme. On ne peut être chrétien sans se laisser interpeller par les cris de notre humanité aujourd’hui. »