Consultation médicale d'une jeune femme pour obésité
Société

Obésité : les jeunes en première ligne

Selon la dernière étude sur le sujet, le nombre de personnes obèses en France a doublé en un peu plus de vingt ans. Une « épidémie d’obésité » qui touche en premier lieu les jeunes et inquiète les professionnels de santé. Dossier par Félix Lavaux.

Afficher le résumé facile à lire et à comprendre
Le nombre de personnes obèses en France a doublé en vingt ans. Une "épidémie d'obésité" qui touche en premier lieu les jeunes et inquiète les professionnels de santé.

Les chiffres sont sans appel. En France, près d’un adulte sur deux est en surpoids et 17 % de la population est en situation d’obésité, indique la dernière étude conduite par l’Inserm et la Ligue contre l’obésité . Si le nombre de personnes en surpoids a tendance à se stabiliser (autour de 30%), l’obésité, elle, croît a un rythme rapide. Elle est ainsi passée de 8,5 % en 1997 à 17 % en 2020.

« Nous avons été un peu surpris de voir la vitesse à laquelle l’obésité se développe dans notre pays, souligne Annick Fontbonne, chercheuse à l’Inserm qui a coordonné l’étude. En 23 ans, le nombre d’obèses a doublé ! C’est inquiétant. Car il faut rappeler les conséquences multiples sur la santé : maladies cardio-vasculaires, diabète, hypertension, cancers… Sans parler des problèmes psychologiques liés au surpoids et des troubles musculo-squelettiques qui s’ajoutent. »

L'obésité en France
17% en 2020
L'obésité en France est passée de 8,5% de la population en 1997 à 17% en 2020

Les jeunes en première ligne

Les jeunes ne sont pas épargnés. Bien au contraire. Depuis 1997, l’obésité chez les 18-24 ans a été multipliée par plus de quatre, et par près de trois chez les 25-34 ans ! « La prise de poids avait tendance à arriver plus tard dans la vie. Aujourd’hui, elle touche les jeunes dès l’entrée dans l’âge adulte. », explique Annick Fontbonne qui pointe notamment les modes de vie à l’origine de cette « épidémie mondiale d’obésité ». « En 40 ans, les modes de vie ont beaucoup changé. Pizzas, hamburgers, kebabs et sodas ont envahi le mode entier et les jeunes Français ne font pas exception à la règle. Nous allons donc avoir une génération de jeunes adultes qui va devoir vivre avec les complications de l’obésité et qui va voir son espérance de vie se réduire. »

Des disparités selon le sexe, l'origine géographique ou sociale

Outre les questions d’âge, l’obésité ne touche pas la population française de la même manière. En effet, il existe de fortes disparités en fonction du sexe, de l’origine géographique ou sociale des personnes concernées. En 2020, les hommes sont ainsi plus souvent en surpoids que les femmes (36,9 % contre 23,9 %), mais c’est l’inverse pour l’obésité : 17,4 % d’obèses chez les femmes contre 16,7 % chez les hommes. D’autre part, l’obésité touche plus les régions du Nord et de l’Est de la France que celles de l’Ouest et du Sud. Enfin, le surpoids et l’obésité sont généralement plus fréquents dans les catégories sociales défavorisées du fait d’un mode d’alimentation plus souvent tourné vers des aliments moins chers, ultratransformés et plus caloriques. Ainsi, on compte 18 % de personnes obèses chez les ouvriers et seulement 9 % chez les cadres.

Alors que faire ?

Les facteurs à l’origine du surpoids et de l’obésité sont multiples : génétiques, psychologiques, nutritionnels... Ils sont aussi liés au développement de la sédentarité. « La prévention est le meilleur traitement », souligne David Nocca, médecin au CHU de Montpellier et co-fondateur de la Ligue contre l’obésité. « Quand on se trouve en situation de surpoids, il faut remettre en place des règles de vie pour ne pas aller vers l’obésité car il est très difficile de revenir en arrière, prévient le médecin. Pour cela, il ne faut pas hésiter à consulter des équipes pluridisciplinaires composées de nutritionnistes, de psychologues, de kinés... » Pour lutter contre cette « épidémie », la Ligue contre l’obésité a mis en place une ligne d’écoute nationale et gratuite. Ouverte du lundi au vendredi de 9 à 17h, cette plateforme baptisée « Obécoute » offre une aide juridique, sociale et psychologique pour « informer, prévenir et sensibiliser la population à cette maladie chronique » qui n’est pas toujours considérée comme telle.

Deux questions à David Nocca, chirurgien au CHU de Montpellier et cofondateur de la Ligue contre l’obésité

Quels sont les facteurs de risque de l’obésité ?

Il existe quatre facteurs principaux : le facteur génétique car nous ne sommes pas tous égaux en terme de métabolisme. Certaines personnes brûlent des calories plus facilement que d’autres. Le facteur psychologique, à mon avis le plus important. Dans les populations d’obésités sévères, on trouve souvent un choc psychologique à l’adolescence (divorce, agression sexuelle, harcèlement). Le facteur nutritionnel : nos modes alimentaires se rapprochent de celui des Etats-Unis où l’on compte 50 % d’obèses. Et enfin, le manque d’activité physique lié à nos modes de vie de plus en plus sédentaires. Même moi, à 51 ans, je passe beaucoup plus de temps sur le téléphone et l’ordinateur qu’avant. Les confinements successifs n’ont pas arrangé les choses non plus.

Que faudrait-il faire ?

Il existe des campagnes pour inciter à manger 5 fruits et légumes par jour . Mais force est de constater qu’elles n’arrivent à enrayer cette tendance au surpoids. Il faut que les jeunes comprennent que l’obésité est une véritable maladie. Il faut dire, sans détour que, lorsqu’on est obèse, on a plus de chances de faire un cancer, un diabète, de l’hypertension, un infarctus, un AVC, de la dépression... Les obèses ont été les premiers touchés par la mortalité du Covid. L’obésité est au centre de nombreuses maladies graves. Il ne faut donc pas prendre cette maladie à la légère.

 

Qu'en est-il à Apprentis d’Auteuil ?

La fondation a fait de l’écologie intégrale l’une de ses priorités d’ici 2026. L’un des volets concerne l’alimentation des jeunes accueillis sur laquelle la fondation veut agir en éduquant les jeunes à une alimentation plus saine. La fondation met à disposition des établissements et des équipes des outils et ressources pour sensibiliser les jeunes : kits d’animation, jeux recettes, explication du tri, du compostage.... « Ici, tout est fait maison, avec le plus possible de produits frais et locaux, explique Haby LY la cuisinière de la Maison d’enfants l’Annonciation (Clamart, 92). Pendant les vacances de Pâques, nous avons consacré une demi-journée à la prévention de l’obésité. Car si on les écoutait, les jeunes ne mangeraient que des frites et des burgers. De mon côté, je tâche de leur faire goûter à tout, même si leur faire manger des légumes, c’est difficile ! Et je les fais cuisiner avec moi de temps en temps. Il existe aussi une commission pour élaborer les menus à laquelle participe les jeunes et une diététicienne.  »