30 ans d'action internationale à Apprentis d'Auteuil
Apprentis d’Auteuil est présent à l’international depuis trente ans. Un engagement profond au service de jeunes et de familles parmi les plus fragiles dans le monde, indissociable des racines de la fondation et de ses valeurs. Le point avec Laura Hendricksen, directrice International.
Il y a trente ans, en 1994, Apprentis d’Auteuil lançait son action à l’international. D’où vient cet engagement ?
Dès 1990, la fondation crée le service Aide et formation des jeunes du monde, qui propose un soutien pédagogique, technique et des échanges éducatifs tournés vers des pays du Sud où les besoins se font criants. Cet engagement trouve sa source dans la dimension chrétienne de la fondation et dans le savoir-faire de la congrégation du Saint-Esprit (1), une œuvre missionnaire d’éducation présente dans de nombreux pays, qui assure la tutelle spirituelle d'Apprentis d'Auteuil. Il s’agit de former des jeunes au sens large, de recueillir, de protéger les enfants les plus en difficulté dans les pays du Sud, à l’image de nos fondateurs, ouverts aux détresses de toutes origines. Ce premier service évolue en 1994 avec le lancement de l'ONG Auteuil International, devenue en 2000 Direction International. Un service Europe est également créé, car parallèlement se développe une nouvelle dimension européenne en France avec les premiers échanges Erasmus pour les jeunes. La fondation souhaite que les jeunes qu’elle accompagne aient ces mêmes opportunités. La fondation y consacre aujourd’hui 1 % de ses ressources. Des organismes (Agence française de développement, Union européenne, Coopération monégasque au développement, etc.), des mécènes, des philanthropes contribuent également à l’action internationale d’Apprentis d’Auteuil.
Comment les jeunes accueillis à la fondation peuvent-ils y trouver leur place ?
D’emblée, les jeunes et les collaborateurs sont associés à cette action avec le lancement des premiers chantiers de solidarité, devenus les actions éducatives de solidarité internationale (AESI). Ils permettent de réhabiliter une école, de restaurer un atelier, de créer un jardin potager... Mais aussi de découvrir un pays, une culture, ses habitants, de nouer des liens d’amitié.
En 2023 par exemple, des jeunes du collège Marcel-Callo de Nogent-sur-Oise (60), ont vécu deux semaines au Gabon au Centre Espérance et mission insertion, qui accueille des orphelins et des enfants en situation de rue. Cette expérience les a bouleversés et les a fait grandir de façon accélérée.
La fondation fait le choix d’agir en partenariat avec des associations locales. Pourquoi ?
Apprentis d’Auteuil a d’emblée ancré sa dynamique dans le soutien de partenaires locaux partageant ses valeurs. Aujourd’hui nous travaillons dans une optique de long terme dans 31 pays, auprès de 68 partenaires qui connaissent le terrain, la réalité de leur territoire, les besoins des enfants, des jeunes et des familles sur place. Outre les bénéfices éducatifs innombrables pour les jeunes en termes de connaissances, de dépassement de soi, d’ouverture aux autres et de levées des peurs, cette coopération solidaire nous permet d’améliorer la qualité de ce que nous faisons par l’échange de pratiques professionnelles. Elles nous inspirent et nous enrichissent réciproquement.
Comment ces partenariats sont-ils noués ?
Aujourd’hui comme hier, nos équipes vont sur place à la rencontre des acteurs locaux pour conforter le fait que nous partageons bien la même vision des missions et des valeurs qui nous animent. Nous œuvrons à leurs côtés dans quatre domaines : la protection des enfants (en particulier, ceux en situation de rue dont le nombre explose partout dans le monde), la formation et l’insertion professionnelle des jeunes, l’accompagnement des familles et le soutien à la parentalité, l’ouverture au monde, avec sa dimension d’éducation à la citoyenneté et à la solidarité internationale. Et enfin, une dimension de plaidoyer pour influencer les politiques publiques en faveur des droits des enfants, dans les pays où œuvrent nos partenaires, pays où ces droits sont quotidiennement bafoués. Nous recherchons ensemble des financements, qu’ils soient publics ou privés et aussi auprès de mécènes et de philanthropes. Les associations elles-mêmes ne reçoivent pas d’aide financière de leur propre État. Elles dépendent de l’élan de leurs membres et de leurs soutiens. L’apport des donateurs est à ce titre essentiel pour mener à bien nos missions.
Le contexte géopolitique est de plus en plus tendu. Comment fait-on pour poursuivre des actions internationales ?
Ces bouleversements géopolitiques nous amènent à constamment réadapter et repenser notre action. On doit prendre en compte bien sûr les questions sécuritaires pour nos équipes, mais quand on parle de réadapter notre action, cela signifie continuer à rendre possible le partenariat grâce au soutien à distance – grâce à la crise Covid (c’est un des aspects positifs) nous avons par exemple développé des méthodes de travail à distance, de rencontres et de jumelages à distance aussi pour les jeunes. Nous pouvons également faire venir nos partenaires ou nous rencontrer dans d’autres pays.
Nous faisons aussi la part des choses entre les agissements des gouvernements dans ces pays et tout ce qu’accomplissent les acteurs de la société civile qui y sont implantés depuis des années et des années. Nous suivons avec attention tout ce qui se passe au Sahel avec le départ des armées françaises, mais les associations qui sont dans ces pays comptent toujours beaucoup sur les associations françaises amies avec lesquelles elles travaillent depuis longtemps, dont Apprentis d’Auteuil, pour continuer à les soutenir.
Quel est le retour des partenaires ?
Nos partenaires nous le disent souvent, ces crises ne sont pas les premières et ne seront pas les dernières, non plus. Comme d’autres acteurs et associations de la société civile, Apprentis d’Auteuil continuera, en fidélité à ses partenaires, à œuvrer au bénéfice des jeunes et des familles les plus vulnérables, qui sont oubliés, qui l’ont toujours été, et qui, demain, ne doivent pas l’être.
Nous cherchons à identifier de nouveaux soutiens financiers publics et privés, pour que ces associations puissent continuer à œuvrer en dépit des bouleversements géopolitiques. Malheureusement, ce sont les populations les plus vulnérables – les enfants, les jeunes, les familles - qui sont les premières à en souffrir. Il est d’autant plus impératif pour nous de continuer à leurs côtés.
Quel est l’impact de cette action internationale ?
Il est impressionnant : près de 15 000 jeunes et familles dans le monde bénéficient de notre action, c’est colossal. La réalité des pays dans lesquels nos partenaires œuvrent fait qu’avec très peu, on peut faire beaucoup. Beaucoup d’enfants et de jeunes qui étaient hier à la rue sont devenus maintenant des professeurs, des commerçants, des artisans, des chefs d’entreprise, des éducateurs, etc. Leur vie a été radicalement changée. Tout comme l’est souvent celle des jeunes qui sont accueillis au sein d’Apprentis d’Auteuil. Le conseil d’administration de la fondation a renouvelé cet engagement à l’occasion du 30e anniversaire de l’action internationale. Il est vrai qu’on ne peut pas répondre à tous les besoins dans le monde tant ils sont immenses... Mais nous choisissons d’agir de manière ciblée, choisie et qualitative. Et là, on peut véritablement œuvrer et même, changer des vies.
1 Depuis 1923, date de l’arrivée à sa tête du bienheureux père Daniel Brottier.
L'action internationale d'Apprentis d'Auteuil
- 31 pays
- 68 partenaires dans le bassin méditerranéen, en Afrique, Amérique du Sud, Canada, Europe, Asie
- 107 établissements de la fondation impliqués
- 15 372 jeunes et familles
- dont 2950 accompagnés par Apprentis d'Auteuil
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