
Nouveau départ ! Un dispositif inédit pour l'insertion des plus fragiles en Eure-et-Loir
Initier un retour vers les institutions et l’emploi des personnes les plus vulnérables grâce à une approche humaine, un accompagnement sans jugement et de proximité, c’est le défi de Nouveau Départ !, un dispositif récemment déployé dans plusieurs communautés de communes d’Eure-et-Loir par Apprentis d’Auteuil. Reportage à Châteaudun.
Châteaudun en Eure-et-Loir, au début des grandes vacances. À 15 heures, le soleil brille sans brûler. La canicule de début juillet a pris fin. Une petite équipe du centre de formation Notre-Dame d’Apprentis d’Auteuil et de Léo-Lagrange Formation stationne un camping-car en bas d’immeubles de Beauvoir, un quartier prioritaire de la ville. Objectif ? Aller à la rencontre des « invisibles », ces personnes éloignées de l’emploi, sans ressources, sans allocations, parfois sans protection sociale et souvent sans formation. Et tout d’abord, se faire voir et connaître.
L’approche de « l’aller vers » dans trois territoires
Parmi elles, des jeunes décrocheurs, en rupture avec l’école. Cette action, une première dans ce quartier, s’inscrit dans le dispositif Nouveau départ !, nouvellement créé par le centre de formation continue (CFC) Notre-Dame d’Apprentis d’Auteuil, situé au château des Vaux, près de Chartres. « Le but consiste à repérer, remobiliser et réinscrire dans le réseau pour l’emploi, par exemple France Travail, ces personnes qu’on dit « invisibles ». Nous nous adressons aux personnes à partir de 16 ans et sans limite d’âge », explique Raphaël Seydoux, coordinateur des dispositifs d’insertion du CFC. Après enquête, la préfecture a défini trois territoires d’intervention : Forêts du Perche et Terres du Perche en zone rurale et plusieurs quartiers prioritaires de Châteaudun où résident les personnes les plus vulnérables. Le travail se fait en partenariat avec tous les acteurs sociaux de ces territoires, afin de déployer ensemble une action concertée.

Repérer les bénéficiaires
Pour cette première demi-journée de présence, l’équipe d’Apprentis d’Auteuil s’est greffée à la Ligue de l’Enseignement, gestionnaire du centre social Le Sourire Dunois qui se situe à proximité. Sur les pelouses en bas d’immeubles, à l’ombre des arbres, un atelier bijoux rassemble mamans et enfants. Des éclats de rire colorent de bonne humeur le décor uniforme des logement sociaux.
Près du terrain de basket, deux animateurs proposent une initiation à la boxe et au rugby. Un enfant qui n’a pas froid aux yeux s’approche du camping-car où jus de fruits et cakes le tentent. « Tu as le Uno ? », interroge-t-il. « Bien sûr. Prêt pour une partie ? », lui répond Loraine Poirot, éducatrice à Apprentis d’Auteuil. La glace est brisée. Nassibullah, 11 ans, originaire d’Afghanistan, reviendra peut-être avec ses parents. Pour l’heure, il s’agit surtout de faire connaître le dispositif grâce à des flyers avec flash codes et numéros de téléphones mobiles des personnes ressources connectées à WhatsApp et à Snapchat, affichage et bouche-à-oreille.
« C’est une première phase de repérage », souligne Marion Bouju, chargée d'accompagnement social et professionnel pour Léo Lagrange. Nous allons vers des personnes très fragilisées, très isolées avec la volonté de créer un lien de confiance pour pouvoir ensuite les accompagner. À nous de lever des freins, par exemple la peur, la honte, la défiance, et de les convaincre que nous sommes capables de les aider. »

Nouer un lien de confiance
L’après-midi s’écoule. Deux adolescents jouent à la pétanque avec l’équipe, puis repartent après avoir goûté. Au loin, sur le terrain de basket, d’autres jeunes s’amusent entre eux mais ne s’approchent pas. Marion va à leur rencontre et tente de les faire venir jusqu’au camping-car. En vain. « Il faut savoir s’armer de patience, analyse François Guérin, formateur en insertion professionnelle à Apprentis d’Auteuil. Si ces jeunes viennent vers nous, ça sera vers 18 ou 20 heures, une fois les familles et les enfants rentrés à la maison. Nous nous adaptons à eux avec une présence étendue en soirée. » François Guérin cible surtout un public jeune, entre 17 et 25 ans. « En ville, ils gravitent autour du foyer des jeunes travailleurs, mais sont sans ressources. Ce sont aussi des jeunes issus de Maisons d’enfants à caractère social, d’autres très isolés en milieu rural, avec des problèmes de mobilité », explique-t-il.
Une aide à la remobilisation
Au volant du camping-car, lui et l’équipe sillonnent les territoires concernés à raison de deux demi-journées par semaine. Le reste du temps, il poursuit son action en voiture banalisée. Objectif ? Accompagner chaque année une trentaine de bénéficiaires par territoire. Une fois repérées et mises en confiance, les personnes s’engagent par contrat dans un dispositif et doivent, contre une rémunération modeste, suivre quinze à vingt heures d’ateliers collectifs ou individuels par semaine pendant trois ou neuf mois, selon les situations. « Une fois le contrat signé, nous aidons les bénéficiaires à se remobiliser, à reprendre confiance en elles, à faire le point sur leur situation. Nous les accompagnons, à leur rythme, vers des solutions adaptées. Concrètement, nous les aidons à réaliser un CV, une lettre de motivation, à prospecter une formation, à gérer leur budget, à trouver un interlocuteur dans le réseau pour l’emploi ou encore à souscrire à une protection sociale pour leur santé », explique Loraine Poirot.
Être bien identifiés
Pour l’heure, une douzaine de personnes ont été repérées sur les trois territoires et quatre ont signé un contrat. C’est encore très loin de l’objectif. Mais, pour l’heure, il s’agit essentiellement de faire connaître le nouveau dispositif aux personnes les plus fragiles. « Aujourd’hui, des contacts ont été pris. Lors de notre prochaine visite, la semaine prochaine, nous serons mieux identifiés et nous nouerons des contacts avec davantage de personnes vulnérables », conclut François Guérin.
En bref
Dispositif d’insertion de la fondation, Nouveau départ ! s’inscrit dans la politique d’Apprentis d’Auteuil de « l’aller vers » les publics les plus vulnérables, afin de travailler remobilisation et insertion sociale et professionnelle. Le projet du centre de formation Notre-Dame d’Apprentis d’Auteuil, au château des Vaux, est le résultat d’un appel à manifestation d’intérêt de la Direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités de la région Centre-Val de Loire.
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