Education et scolarité
03 avril 2019

Solidarité : les jeunes s'engagent !

À Boulogne, Chartres, Priziac, Saint-Estèphe, Grenoble…Partout, des jeunes d’Apprentis d’Auteuil s’engagent pour les autres par des initiatives solidaires. Des actions pour lesquelles ils s’enthousiasment. Et qui les font réfléchir et grandir.

Le sens du partage et de l’ouverture aux autres n’attend pas le nombre des années. L'école primaire Saint-Étienne située à Saint-Estèphe, dans le Médoc, a ainsi noué un partenariat avec la maison de retraite de Vertheuil toute proche. Les écoliers vont régulièrement visiter les résidents. Juste avant Noël, ils accueillaient pour la première fois les personnes âgées.
Au programme, visite de l'école, repas festif et spectacle préparé par les enfants. Lili et Raphaël, 8 ans, n'en reviennent pas : "C'était super ! Nous avons donné aux dames de la maison de retraite des cadeaux que nous avions préparés. Ensuite, nous avons chanté avec elles. Ça nous a fait très plaisir parce qu’elles avaient le sourire. »
Des temps de rencontre très importants, à la fois pour les enfants et pour les aînés
. Les petits ont parfois très peu de contact avec les personnes âgées. De leur côté, les résidents de la maison de retraite attendent avec impatience ces visites qui rompent avec leur quotidien, et pour certains, leur solitude. « Les enfants vont à la rencontre de personnes qu’ils n’auraient jamais rencontrées autrement, s’ouvrent aux générations précédentes, explique Emmanuelle Barsot, la directrice. C’est un apprentissage de la différence qui fait du bien à tous ! »

Découvrir les autres, se découvrir soi-même

Bien loin de là, à Creil, dans l’Oise, ce sont les adolescents de la Maison d’enfants Joseph Wresinski qui participent aux petits déjeuners servis le dimanche par l’Ordre de Malte aux plus démunis et aident au stockage des denrées. Comme Amandine, 16 ans : « Cela m’a fait mal au coeur de voir des gens dans cette situation. » Dominique Grassin d’Alphonse, animatrice en pastorale, se souvient de Jean- Lucien, venu tous les dimanches ces deux dernières années : « Aider les autres l’a vraiment accroché et fait grandir. Il accueillait les gens, discutait avec eux. Venant d’un milieu très précaire, il y trouvait de la reconnaissance et prenait confiance en lui. Ce qui me frappe, c’est que les jeunes sont très généreux et capables de donner beaucoup d’eux-mêmes. »
Nasser, lui, a pris conscience de ces situations difficiles :« J’ai découvert la misère due à la solitude parce que la majorité de ces personnes ne vivent plus avec leur famille. Et les phénomènes d’alcoolisme et de consommation de drogue quand on est à la rue. Mais aussi l’humanité de ces personnes lorsqu’on parle avec elles. »

De la solidarité à l'insertion

Des jeunes de la MECS Louis Roussel (91) proposent du café aux sans abri gare de Lyon (c) Michel Le Moine / Apprentis d'Auteui
Des jeunes de la MECS Louis Roussel (91) proposent du café aux sans abri gare de Lyon (c) Michel Le Moine / Apprentis d'Auteui

Depuis bientôt trois ans, grâce à l’investissement de Daouda Comara, chargé d’animation, et de son collègue Hakim Derni, éducateur spécialisé, des jeunes de la Maison d’enfants Louis-Roussel (Massy, 91) mènent des actions bénévoles de solidarité auprès de partenaires associatifs de la Ville et du Département, faisant ainsi grandir leur sens des responsabilités : maraudes, temps avec des personnes âgées en maison de retraite, épicerie sociale, protection civile, banque alimentaire, recyclerie…
En nouant des contacts, beaucoup ont pu trouver un job d’été, financer des projets personnels, un apprentissage ou même un travail. Pour remercier les jeunes volontaires, la Ville de Massy leur a remis l’an dernier une attestation valorisant leur engagement citoyen. « Nous tâchons d’inculquer aux jeunes l'importance d’aider celui qui a des difficultés, explique Daouda Comara. Ce genre d’actions a un impact réel sur le comportement des jeunes. Nous les voyons se transformer, voire pour certains, changer du tout au tout, devenir enthousiastes et vraiment déterminés. Car ils ont été touchés dans leur cœur en mettant concrètement en œuvre le mot “solidarité”. On leur apprend aussi qu’on peut aider même si on a très peu. »
Alpha, 17 ans : « Ces actions de bénévolat me permettent de rendre service et d’être disponible et j’aime bien ça. Cela donne de la joie, on rencontre du monde, on s’enrichit ! Rendre service, c’est aussi, pour moi qui suis arrivé en France il y a 18 mois, une belle occasion de m’intégrer. »

Pour un monde plus juste

Des jeunes de Saint-Michel câlinent les chiens abandonnés de la SPA dans le cadre d'un partenariat (c) DR
Des jeunes de Saint-Michel câlinent les chiens abandonnés de la SPA dans le cadre d'un partenariat (c) DR

À Saint-Michel (Priziac, 56), l’engagement des jeunes s’est tout d’abord concrétisé par un projet médiation lancé en 2001 dans l'établissement. « C’est un acte de citoyenneté, un service offert à des personnes ayant des difficultés relationnelles, pour qu’elles trouvent elles-mêmes une solution à leur conflit, souligne Johann Quenault, formateur à la médiation, coordinateur des activités éducatives du lycée professionnel et de l’internat éducatif et scolaire. Les jeunes sont formés à la comédiation. Et cela fonctionne ! Ils développent ainsi des qualités citoyennes qui rejaillissent sur leur vie entière. »
Pour prolonger cette action éducative, l’animateur a proposé au groupe de comédiateurs et aux jeunes sensibles à cette approche, de plancher sur des actions de solidarité. Les jeunes ont choisi plusieurs microprojets : la collecte de denrées et de produits d’hygiène à distribuer lors de maraudes à Lorient, un partenariat avec une maison de retraite proche de Pontivy et avec la SPA, le travail avec une association de clowns à l’hôpital.
"Ils prennent conscience que la vie en société ne peut pas être individualiste, qu’on est toujours en interaction avec d’autres, que la différence est une force et qu’elle permet d’avancer ! conclut Johann Quenault. Ils constatent aussi qu’en retour les gens leur tendent la main, sans les juger. Je pense sincèrement que l’éducation à l’humanité, à la solidarité et à la citoyenneté peut permettre de construire un monde plus juste. En mettant bout à bout toutes ces petites choses réalisées !"

NATHALIE MONS Présidente du CNESCO

Que révèle l’enquête du CNESCO (1) sur les engagements citoyens des lycéens ? Les lycéens ne sont pas désinvestis, mais entendent s’engager autrement. C’est l’associatif qui tient le haut du pavé des engagements structurés, sur fond de développement fort des associations et du bénévolat en France. Plus de 40 % des lycéens déclarent une expérience d’engagement associatif dans l’humanitaire ou la défense de l’environnement, actuelle ou sur les années passées.

Que dire des 4 % des lycéens interrogés (ceux de terminale), qui s’excluent
de toute participation citoyenne ?
On les trouve principalement parmi les lycéens professionnels (11 % des élèves en LP), chez les garçons plus que les filles. Ils présentent à la fois des connaissances civiques très faibles, une forte défiance envers les institutions et un sentiment d’impuissance à peser sur les affaires de la cité. Ces résultats s’inscrivent en cohérence avec les conclusions d’enquêtes sur la participation électorale des jeunes à l’âge adulte : la France est un des pays de l’OCDE où l’abstention est la plus corrélée au niveau de diplôme : la participation décroît avec le niveau d’éducation des jeunes. Or, la recherche sur l’éducation le montre, ce sont principalement les engagements à l’âge scolaire qui fondent les engagements civiques à l’âge adulte, alors que les cours traditionnels d’éducation à la citoyenneté, grande spécialité française, s’avèrent moins efficaces. C’est un renouvellement, dès aujourd’hui, de l’éducation à la citoyenneté dans l’école, qui fondera demain la qualité de la démocratie. (1) CNESCO : Conseil national d’évaluation du système scolaire