Médiation animale
Société
26 décembre 2025

Quand les animaux apaisent les ados : les bienfaits de la médiation animale

Pour certains jeunes, l’adolescence s’accompagne d’un sentiment de mal-être, d’un manque de confiance en soi, de difficultés scolaires ou relationnelles, d’anxiété, voire d’isolement. Autant de troubles que la médiation animale peut apaiser. L’enjeu : apporter du réconfort et favoriser l’épanouissement du jeune. 

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À travers la médiation animale, autrement dit la présence d'un animal (chien, cheval, chat...) et d'un adulte formé, l’adolescent a le sentiment d’être attendu et entendu dans ce qu’il dit, fait et pense. Il reprend confiance en lui et en l'autre.

Cet après-midi, Alan, 18 ans, se montre tout doux avec les chevaux sélectionnés pour la séance de médiation animale organisée dans son lycée et encadrée par des professionnels.
L’objectif de l’établissement est d’aider les adolescents à mieux exprimer et à maîtriser leurs émotions, à gérer leur agressivité, à s’apaiser. « Les chevaux, c’est ma passion, explique-t-il. Moi qui suis une pile électrique, je me calme avec eux, je me sens responsable d’eux. Je deviens plus gentil. Je ressens un certain bien-être. » Il n’est pourtant pas loin le temps où Alan ne réussissait pas à placer un licol sur la tête d’un cheval, par manque de confiance en lui et en l’animal.
 

Accompagner un processus de résilience

C’est dans ces progrès bien visibles que réside le succès grandissant de la médiation animale, en expansion en France. Elle permet à des personnes en souffrance - principalement des seniors, des personnes handicapées ou en milieu carcéral, mais aussi des enfants et des adolescents – de reprendre confiance en elles, de se sentir comprises et valorisées, d’exprimer et de partager plus facilement leurs émotions, de gagner en assurance et en autonomie.

Elle suscite de plus en plus d’intérêt des professionnels du soin et du médico-social, qui en constatent les bénéfices, notamment pour les adolescents, alors que leur santé mentale est devenue un enjeu de société. La médiation animale peut être recommandée dans un accompagnement éducatif ou un parcours de soins par un éducateur spécialisé, un chef d’établissement ou un infirmier scolaire, un psychologue, un psychiatre, un médecin…
Pour exercer, ils doivent être formés par des instituts certifiés au Répertoire national des certifications professionnelles dont l’Institut français de zoothérapie.

Exprimer des besoins

« La médiation animale est à la fois corporelle, sensorielle et relationnelle, insiste Sandie Bélair, psychologue clinicienne, intervenante en médiation animale, cofondatrice de Résilienfance, un organisme de formation professionnelle en Nouvelle-Aquitaine. L’animal peut être considéré comme un “havre de sécurité”. Il donne à l’adolescent le sentiment d’être attendu et entendu dans ce qu’il dit, fait et pense. Par sa seule présence juste et sensible, un chien, un cheval ou un chat peut faire comprendre et ressentir à l’adolescent qu’il est digne d’attention et de lien. »

En présence d’un animal, l’adolescent se sent suffisamment en sécurité pour ne plus avoir à se cacher derrière ses mécanismes de défense : détourner le regard, bavarder ou se murer dans le silence, provoquer… Il ose être lui-même sans craindre d’être jugé ou rejeté. Un changement essentiel pour l’adolescent, qui traverse une période de bouleversements physiques et émotionnels.

Le contact avec l’animal lui apporte le lien avec un être vivant et vrai. Une relation authentique qui pourrait lui apporter une bouffée d’oxygène face au monde virtuel d’Internet et des réseaux sociaux, avec son lot de satisfactions et de déconvenues.

Une relation vivante et affective

« Dans un premier temps, le jeune n’utilise pas forcément la parole pour entrer en lien avec l’animal, par timidité, peur de mal faire ou méfiance. Il communique autrement, souligne Benoît Tenel, éducateur spécialisé, praticien en médiation animale et cofondateur de l’Institut spécialiste du lien homme-animal (ISLHA). Il l’observe, s’en approche, le caresse, attend sa réaction, relâche ses tensions. Encore faut-il que l’animal soit sélectionné et éduqué : tous ne sont pas aptes à faire de la médiation. Ils doivent être préparés aux contacts, aux réactions positives ou négatives des bénéficiaires, et parfaitement adaptés aux besoins de chacun. » Ils offrent ainsi aux adolescents une relation vivante et affective, « un îlot de constance » résume Sandie Bélair.

Face au mal-être des adolescents, la médiation animale ne remplace pas une prise en charge psychologique ou psychiatrique lorsqu’elle est nécessaire. Elle n’apparaît pas non plus comme une solution « miracle », mais comme une voie douce et efficace pour renouer avec l’estime de soi, retrouver un apaisement émotionnel, recréer du lien et progresser sur le chemin de la vie.

Deux questions à Daniel Marcelli, professeur émérite de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent

Quel est pour vous le cadre dans lequel la médiation animale peut être envisagée pour les adolescents ?

La médiation animale désigne toute action à visée de soin menée entre un adolescent, un animal et un soignant, qui permet d’instaurer une relation de confiance entre un garçon ou une fille et un animal neutre et bienveillant, sans jugement ni attente.
La simple présence d’un animal peut réduire le stress et favoriser la production d’ocytocine, l’hormone de la confiance et du lien social. À une condition : que le patient soit intéressé, l’animal sélectionné - non agressif, participatif, très réceptif aux tensions de l’adolescent - et le soignant compétent. Tout est question d’accordage entre un jeune, un animal et un soignant.

Peut-on parler de médiation animale à la maison ou dans un établissement scolaire ?

Pour moi, c’est un abus de langage, car, en l’absence de soignant, il s’agit plutôt de connaissance de la nature, essentielle pour nombre de jeunes qui, en ville ou dans les banlieues, n’ont aucun contact avec elle. De découverte de la vie des animaux également. Des animaux qui présentent une forme de placidité dans une société d’excitabilité permanente.
Quand un adolescent s’investit dans une relation de soin ou de responsabilité vis-à-vis d’un animal, cela modifie son identité dans le cadre familial et scolaire : il n’est plus seulement « celui qui souffre » mais « celui qui agit ». Cela peut faire évoluer les relations avec ses parents et ses enseignants.

À APPRENTIS D’AUTEUIL

Le projet éducatif de la fondation repose sur deux convictions fortes : la prise en compte de l’enfant ou de l’adolescent dans toutes ses dimensions – corps, cœur, esprit – et la construction d’une véritable communauté éducative où chacun, jeune, famille et professionnel, à sa place. C’est dans ce cadre bienveillant que des activités de médiation animale sont proposées aux jeunes accompagnés par Apprentis d’Auteuil, par exemple au campus Saint-Philippe de Meudon (chiens et chevaux) et aux services éducatifs Louis-et-Zélie-Martin de Colmar (des cochons d’Inde). 
Complémentaires au travail des psychologues, ces activités apaisent, rassurent et responsabilisent les adolescents. Elles leur permettent de livrer beaucoup d’eux-mêmes dans leurs interactions avec l’animal, que ce soit par des mots de tendresse ou des reproches, de cultiver le lien, l’estime de soi et de ressentir beaucoup de joie.

POUR ALLER PLUS LOIN

• Institut français de zoothérapie - institutfrancaisdezootherapie.fr
• Association d’aide à l’enfance par la médiation animale - resilienfance.org
• Institut spécialiste du lien homme-animal - islha.com

À LIRE

L’enfant, l’animal, une relation pleine de ressources de Daniel Marcelli - Éd. Érès
L’enfant et l’animal, une relation singulière sous la direction de Boris Cyrulnik et Sandie Bélair - Éd. Duval