Stand up au Grand Rex - le final
Plaidoyer

Stand up ! La voix des jeunes résonne fort au Grand Rex

Pour son deuxième événement grand public, « Stand up ! Une place pour chaque jeune », Apprentis d’Auteuil a réuni plus de 1600 personnes au Grand Rex, à Paris. Une soirée tout à la fois joyeuse, festive, pleine d’émotion et de gravité au cours de laquelle des jeunes accompagnés par la fondation ont livré un peu de leur quotidien, de leurs difficultés, de leurs rêves. Un plaidoyer pour plus d’inclusivité et de bienveillance.

Ce 30 novembre 2023, le Grand Rex, mythique salle de spectacle parisienne, arbore les couleurs d’Apprentis d’Auteuil sur sa façade. Il est presque 19 h, la salle bruisse de mille conversations. Un large public, parmi lequel des personnes sensibles à la cause des jeunes en difficulté, certains travaillant dans le champ social, des amis de la fondation, des donateurs, des institutionnels, des anciens, des collaborateurs et bien sûr, des jeunes et des familles. Plus de 1600 personnes ont répondu présent à l’invitation lancée par la fondation.

Stand up au Grand Rex, arrivée du public
Au Grand Rex, l'arrivée du public pour l'événement "Stand up ! Une place pour chaque jeune", organisé par Apprentis d'Auteuil (c) Ilan Deutsch/Apprentis d'Auteuil

Stand up ! Une place pour chaque jeune

C’est pour Apprentis d’Auteuil la deuxième édition de son événement de plaidoyer national (le précédent, Prendre le parti des jeunes, s’est tenu en mars 2022 à la Maison de la Radio). « Stand Up », le titre-accroche de la soirée, puise son inspiration dans le projet éducatif de la fondation, rappelle en ouverture Nicolas Truelle, directeur général : « Il s’agit de faire de chacun des jeunes que nous accompagnons des hommes et des femmes debout. C’est l’ambition d’Apprentis d’Auteuil, que chacun ait une place, un rôle dans la société, poursuit-il. Nous voulons la porter et la partager par la voix des jeunes. Tout au long de la soirée, vous allez entendre des parcours de jeunes, leurs difficultés, leurs rêves, leurs combats. Pour que cela marche, il faut que chacun se mette en mouvement. »

Stand up au Grand Rex - Emma
Emma, étudiante en Sciences de l'éducation, a lancé l'association Speak pour faire entendre la voix des jeunes. (c) Besnard/Apprentis d'Auteuil

Plaidoyer pour que les jeunes soient entendus

Animée par Sébastien Folin, visage bien connu des téléspectateurs, la soirée démarre avec Emma. La jeune femme de 21 ans, actuellement étudiante en sciences de l’éducation, a déjà parcouru un chemin exceptionnel des foyers de la protection de l’enfance jusqu’à la prise de parole en 2022 à la Maison de la Radio et le lancement de son association SPEAK ! D’une voix assurée, elle évoque les violences intrafamiliales qui ont marqué son enfance, son placement, sa lente reconstruction, puis adresse un vibrant appel au public : « Nous entendons trop souvent dire que la jeunesse ne s’engage pas, qu’elle est rivée sur son téléphone. Mais la jeunesse est là ! Elle a besoin qu’on l’entende. Pas demain, maintenant. Si nous sommes en face de vous ce soir, c’est parce que des adultes, des éducateurs, des profs ont eu confiance en nous et nous ont poussés à devenir qui nous sommes. »» Elle pose une question simple, qui renvoie chacun à ses propres responsabilités. « Les jeunes ne s’expriment pas, ou est-ce plutôt leur parole qui n’est pas entendue ? »

Stand up au Grand Rex, Camille Peuny, sociologue et Sébastien Follin
Camille Peugny, sociologue, spécialiste du déterminisme social, répond aux questions de Sébastien Follin (c) Besnard/Apprentis d'Auteuil

Neuf jeunes au profils différents vont ainsi se succéder toute la soirée sur la scène du Grand Rex et porter leur voix au plus haut. Des interventions ponctuées des prises de parole d’un sociologue, Camille Peugny, spécialiste du déterminisme social, d’une militante écologiste, Léa Falco, qui fait le lien entre le changement climatique et son impact sur les plus fragiles, d’un comédien, Issa Doumbia, lui-même issu des quartiers, et de Charlotte Caubel, secrétaire d’État chargée de l’enfance.

Stand up au Grand Rex, Céline et Sébastien Follin
Céline témoigne de son long parcours pour se relever d'une phobie scolaire et de son futur métier d'esthéticienne, questionnée par Sébastien Follin (c) Besnard/Apprentis d'Auteuil

Vaincre la phobie scolaire

La première à ouvrir la soirée, Céline, s’est relevée d’une grave dépression et d’une phobie scolaire. À voir cette jeune fille qui paraît si à l’aise, évoquant sa vie avec recul et humour, nul ne s’imaginerait les ruptures et souffrances qui ont marqué sa vie. En CAP esthétique, elle rêve d’ouvrir un salon. « Laissez vos enfants ouvrir les mauvaises portes ! exhorte-t-elle. C’est comme cela qu’on apprend, par ses erreurs. » Et s’adressant aux jeunes : « Ne lâchez rien, faites confiance à ceux qui sont autour de vous ! »

Transcript

La France, pays des destins tout tracés ?

Camille Peugny, sociologue spécialiste de la jeunesse et de la reproduction des inégalités sociales, enchaîne avec une analyse des freins à la mobilité sociale. La France est le pays de l’OCDE où la condition de la naissance impacte le plus les trajectoires professionnelles et sociales. Parmi les facteurs qui figent les destins, il cite l’origine sociale, ethnique et territoriale des personnes, mais aussi le genre. Ces facteurs sont aggravés par l’étroite dépendance financière des jeunes à leur famille, contrairement au Danemark où tout jeune perçoit un revenu pour poursuivre ses études et grandir en autonomie.

L'accès à la mobilité, une des clés de l'insertion

C’est le moment pour Mélissa, 20 ans, originaire d’une petite ville de l’Oise, près de Creil, d’entrer sur la scène du Grand Rex, épaulée par son éducatrice, Julie. La jeune fille raconte résume en préambule : « Je ne cochais pas les bonnes cases ». Son témoignage poignant, trace les grandes lignes d’un parcours entravé très tôt par les accidents de la vie. Mélissa pointe le frein principal à ses yeux, le difficile accès à la mobilité quand les transports en commun sont rares et le permis de conduire financièrement inaccessible.

Une belle histoire

Sur scène, Mélissa a partagé ses envies de travail mais également les freins qu’elle rencontre pour accéder à un emploi au service des autres. Retrouvez Mélissa et son éducatrice Julie à Creil dans cette vidéo de deux minutes. À l’issue de la soirée, un spectateur a offert à Mélissa le financement pour passer son permis de conduire, qu'elle va démarrer bientôt.

Voir la vidéo

Stand up au Grand Rex - Caroline Maigne
Caroline Maigne éclaire les défis des professionnels qui accompagnent les jeunes vers l'insertion sociale et professionnelle. (c) Besnard/Apprentis d'Auteuil

Les conditions de la réussite

Caroline Maigne, conseillère emploi dans un dispositif dédié à l’insertion d’Apprentis d’Auteuil, lui succède au micro et raconte comment elle a réussi à recruter 1000 jeunes pour les remettre sur les bons rails, grâce aux réseaux sociaux. Elle pointe les embûches qui jalonnent les parcours des jeunes, mais surtout, souligne l’envie et la motivation qui les caractérisent. Elle n’occulte pas les difficultés, les retards des jeunes, leurs absences, mais explique le contexte : un milieu familial parfois instable, la vie du quartier qui interfère avec l’assiduité scolaire. « Les parcours ne sont pas linéaires, mais si le jeune est mû par une envie et qu’il a face à lui un accueil inconditionnel, constant, ça marche », conclut-elle.

Stand up au Grand Rex, Keyla
Keyla, originaire de l'île de La Réunion, témoigne des difficultés d'insertion des jeunes des territoires outre-mer. (c) Besnard/Apprentis d'Auteuil

Les freins à l'insertion des jeunes de l'Outre-mer

Après le plaidoyer pour plus de confiance de jeunes mineurs non accompagnés, tous inscrits dans des parcours professionnels ou scolaires, entre en scène la jeune Keyla, 17 ans, originaire de La Réunion. « Fermez les yeux, faites 10 000 kms au sud du Grand Rex et vous y êtes !  La Réunion, ce sont des couleurs, la solidarité, des cultures et des religions multiples, un beau décor, de belles senteurs, un coin de paradis. Mais aussi un sentiment d’oubli. L’Hexagone est loin. Nous souhaitons être mieux entendus, qu’on nous aide à sortir la tête de l’eau. » Avec un taux de chômage chez les jeunes de 18%, un manque de logement, l’île n’offre pas toutes les opportunités à la jeunesse. « Nous voulons être autonomes, libres, travailler, nous épanouir ! »

Stand up au Grand Rex, Clara sous le regard de Léa Falco
Clara sur scène, sous le regard de Léa Falco (c) Besnard/Apprentis d'Auteuil

Les difficultés liées au handicap

Membre du collectif Pour un réveil écologique, Léa Falco rappelle ensuite que les plus précaires sont les premières victimes du changement climatique. Clara, 28 ans, entre alors en scène. La jeune femme souffre de paralysie cérébrale depuis sa naissance, « ce qui a conditionné beaucoup de choses, souligne-t-elle. On m’a beaucoup demandé de m’adapter. Je ne suis pas mon handicap ! » La jeune femme plaide pour une société inclusive, plus ouverte à la différence. Un témoignage également courageux et émouvant, qui met en lumière des difficultés souvent tues.

Stand up au Grand Rex, intermède musical avec des jeunes du Château des Vaux
Intermède musical avec des jeunes des établissements Notre-Dame, au château des Vaux, près de Chartres (c) Besnard/Apprentis d'Auteuil

Plus de temps et de confiance

Après un titre interprété par des jeunes des établissements Notre-Dame, au château des Vaux, près de Chartres, place à Rayan, 27 ans, responsable des achats dans une entreprise industrielle. « J’ai grandi dans une famille aimante. Je n’étais pas intéressé par l’école. » Il raconte son parcours, le bac, puis son décrochage scolaire : un trou d’air de plusieurs années. « À 23 ans, je me suis repris en main, j’ai fait de belles rencontres. C’est ainsi que j’ai pu avoir à nouveau accès à l’éducation. » Donnez une seconde chance aux jeunes, permettez-leur de trouver leur voie, donnez-leur du temps, tels sont les messages que le jeune homme souhaite porter.

Stand up au Grand Rex, Olivia et Sébastien Follin
Olivia, mécanicienne des engins de chantier, se bat contre les déterminismes liés au genre. Ici avec Sébastien Follin (c) Besnard/Apprentis d'Auteuil

Combattre les préjugés liés au genre

Olivia, 26 ans, lui succède. Le contraste entre la coiffure de la jeune femme, sa tenue féminine, et les images qui défilent à l’écran est frappant : Olivia est mécanicienne sur des engins de chantier. En bleu de travail, elle évolue à son aise sur un plateau technique, au milieu de ses collègues masculins. Pour en arriver là, Olivia a dû se battre contre les stéréotypes et les préjugés. « Personne n’a cru en moi. Je me suis vraiment sentie blessée et humiliée. J’ai pensé arrêter. C’est difficile de ne pas recevoir de soutien de son entourage. Mais est-ce de leur faute, s’interroge-t-elle ? Sans modèle, on ne peut être boosté que par soi-même. » Olivia partage avec le public sa passion pour son métier, qui, dit-elle demande beaucoup de réflexion. Elle se définit comme le médecin des machines. « Je voulais aussi prouver que la société avait tort. Il faut encourager les femmes à suivre leur passion, avoir confiance en soi et s’appuyer sur les gens qui ont confiance en nous. » Puis un cri du cœur au public : « Il faut avoir confiance en ces petits jeunes ! »

Stand up au Grand Rex, lssa Doumbia et Mathéo Dassé
Stand up au Grand Rex, lssa Doumbia et Mathéo Dassé (c) Besnard/Apprentis d'Auteuil

Ouvrir la voie aux rêves

Le comédien Issa Doumbia fait une entrée remarquée sur la scène, acclamé par les jeunes présents dans la salle. Pro de la vanne, formé à l’école Jamel Debbouze, il évoque rapidement son parcours, sa vie en banlieue, la dyslexie, la séparation de ses parents, sa passion pour le théâtre plus que pour l’école, les belles rencontres qui ont été déterminantes pour lui. « Personne ne réussit seul, reconnaît-il. Depuis le chauffeur de bus jusqu’à la personne qui te forme, t’aide, te donne envie, chacun a son importance. Le conseil que je pourrais donner à un jeune, c’est de beaucoup croire en soi, d’avoir des objectifs. Il faut créer des rencontres, ne pas rester assis sur sa chaise. Se donner les moyens pour aller au bout de son rêve. »

La transition est parfaite pour introduire Matéo, apprenti comédien, qui rêve de théâtre et de cinéma, et livre un numéro ficelé avec la complicité d’Issa Doumbia. Charlotte Caubel, secrétaire d’État, prend la suite en s’adressant aux collaborateurs d’Apprentis d’Auteuil et à l’institution en général : « On compte sur vous, on vous fait confiance pour avoir des rêves, de l’audace et de l’énergie. Vous êtes de formidables stimuli. »

Stand up au Grand Rex - tous les jeunes en photos avec Sébastien Follin
Liesse générale à l'issue du Stand up au Grand Rex : les jeunes posent avec Sébastien Follin (c) Ilan Deutsch/Apprentis d'Auteuil

La diversité des parcours et des solutions

La soirée s’achève avec la prise de parole de Ramy, issu des quartiers nord de Marseille, qui veut rompre avec l’image qu’ils véhiculent : le trafic de drogue, l’insécurité, la pauvreté. « Il y a aussi la solidarité, le partage, beaucoup de soleil. J’ai toujours été assez à l’aise à l’école, mais j’ai toujours eu du mal à me projeter dans l’avenir. »
Après un bac scientifique mention très bien, il s’inscrit en fac de médecine, mais ni préparé, ni motivé, ni heureux, il abandonne et se réoriente en licence de biologie. C’est alors que Ramy entre dans le programme Impact Jeunes et se découvre entrepreneur. Après avoir poursuivi ses études à l’EM Lyon, une école de commerce, il est maintenant consultant en transformation digitale. Malgré les obstacles, il a réussi, ce qui n’aurait pas été possible sans l’aide de beaucoup de personnes.  

Une soirée-plaidoyer riche en témoignages qui montre la diversité des parcours, le courage et l’envie de réussir, l’engagement des jeunes.

Le STAND UP ! en bref

  • 1 600 personnes réunies au Grand Rex pour entendre la jeunesse
  • 30 jeunes d'Apprentis d'Auteuil sur scène
  • Les témoignages d’Emma, Céline, Mélissa, Keyla, Clara, Rayan, Olivia, Matéo et Ramy. Mais aussi Dhiaeddine, Alpha Moussa, Alpha Oumar, Kienhao, Richard, Amadou Kolon, Safi, Abdoulaye, Mamadou Adama, Moussa Mohamed. Ainsi que Leny, Alexis, Sabrina, Brian, Libass, Marie, Andreas, Rachel, Larry et Matéo Dassé !
  • Des témoignages de leurs parcours, de leurs espoirs, leurs revendications, leurs coups de gueule…
  • Les animations et interventions de Sébastien Folin, Nicolas Truelle, Caroline Maigné, Léa Falco, Camille Peugny, Issa Doumbia.
  • Des interpellations pour mobiliser et faire le choix d’une société où chaque jeune a sa place…