Témoignages

Frédéric Morel, une vie bien remplie

Frédéric Morel, ancien des établissements Jean-Marie Vianney, est un homme comblé. Marié et père de quatre enfants, il partage ses journées entre son métier, sa famille et ses activités associatives. Retour sur un beau parcours.

Carrières de Gillonay, dans l’Isère, un des cinq gisements du groupe Gachet, une entreprise familiale
de travaux publics et de fabrication de béton prêt à l’emploi. Ce matin d’octobre, à travers les vitres de
la cabine installée à l’entrée du site, les visiteurs médusés assistent à un ballet incessant de chargeurs, pelles hydrauliques et autres tombereaux. Des engins de chantiers qui témoignent d’une activité bien particulière, celle de l’extraction de granulats, ces fragments de roche destinés à la construction de bâtiments, de voies ferrées et de réseaux routiers. C’est dans ce décor étonnant que Frédéric Morel, ancien des établissements Jean-Marie Vianney (Isère), passe l’essentiel de ses journées.

Conducteur d’engins de carrière

Conducteur d’engins de carrière, le professionnel a pour mission de livrer en semi-remorque les granulats produits par le gisement aux trois centrales à béton du groupe. Elles sont installées à La Côte-Saint-André, toute proche, Artas, distante d’une trentaine de kilomètres et Chaponnay, dans le département du Rhône. Frédéric Morel est également régulièrement mandaté pour des livraisons chez des particuliers. "Pour obtenir des granulats, précise-t-il, on prélève directement des gravats dans la roche meuble à l’aide de pelleteuses." Les fragments ainsi obtenus sont acheminés vers les installations de traitement automatisées voisines où s’effectuent leur concassage, leur tri par taille et leur lavage. Tout un travail surveillé par le pupitre de commande du pilote d'installation, placé à l’entrée du site. Les établissements Gachet, qui emploient 150 personnes, fournissent 800 000 tonnes de granulats par an.

Saisir sa chance

Retour en arrière. Né en avril 1973 à Voiron, à 25 km au nord-ouest de Grenoble, Frédéric Morel, dernier enfant d’une fratrie de quatre, vit une enfance presque ordinaire entre une mère femme au foyer et un père bibliothécaire. En 1983, c’est le drame : le père de Frédéric décède brusquement. "Maman n’en pouvait plus, d’autant plus que mon grand frère, de quatre ans mon aîné, souffrait d’une maladie grave, la myopathie, qui ne lui laissait aucun répit." Résultat, les difficultés scolaires de l’enfant s’aggravent à l’entrée au collège. Il redouble sa 6e, puis sa 5e. Sa mère entend alors parler d’un collège à petits effectifs sur le point d’ouvrir à La Côte-Saint-André, tenu par Apprentis d’Auteuil, les actuels établissements Jean-Marie Vianney. En octobre 87, âgé de 13 ans et demi, une nouvelle vie commence pour Frédéric. Les débuts à l’internat sont rudes, mais l’adolescent saisit rapidement sa chance. "L’hiver, il faisait froid, je vivais toute la semaine en collectivité, mais en retour, quel accueil et quelle générosité !" Et l’ancien de La Côte Saint-André de se remémorer : "J’ai eu pour commencer un très bon directeur, à la fois très humain et très strict, monsieur Jean-Yves Guérault. Il nous considérait comme ses propres enfants et n’avait de cesse de nous faire progresser sur tous les plans. Scolaires bien entendu, mais pas uniquement. Je me souviens en particulier de sorties à vélo qu’il nous proposait par beau temps après les cours. Je détestais cela et j’étais souvent à la traîne, sauf dans les descentes. Un jour, à mon grand étonnement, M. Guérault m’a proposé de continuer l’aventure, non pas à vélo, mais comme photographe, dans le Trafic qui nous suivait. Quelle délicatesse !"

Des débuts rudes

Frédéric Morel en compagnie de son directeur, François Gachet, responsable de l'entreprise de travaux publics du même nom avec son frère Philippe. © JP Pouteau/Apprentis d'Auteuil

Frédéric se souvient aussi de l’aventure que représentait pour tous cet établissement qui démarrait. "Avec mes 15 camarades de l’époque, j’étais le numéro 13. On était répartis dans un immense bâtiment, avec des éducateurs et des profs très disponibles, comme Didier Garin ou Monsieur Bret, mon prof de cordonnerie. C’était une vraie chance à saisir." Côté scolaire, le jeune homme prépare un CAP de cordonnerie qu'il obtient au bout de deux ans et demi. "Le mercredi après-midi, se souvient-il encore, on rendait visite à une bienfaitrice. En retour, elle nous offrait de délicieuses tartes aux pommes et des bonbons. Cette femme était veuve et elle nous accueillait à bras ouverts. On a aussi monté un poulailler qu'on gérait en vendant nos oeufs à l'économe. On était deux à s'en occuper. Cela nous responsabilisait."

Une vie bien remplie

En 1991, son CAP en poche, Frédéric Morel ouvre une boutique de cordonnerie. "Je l’ai tenue onze ans, avant de la revendre pour m’installer comme responsable de magasin d'une chaîne de cordonnerie à Bron, dans le Grand Lyon." explique-t-il encore. À cette époque, Frédéric fait la connaissance de Marie, qui deviendra sa femme en 1998. Quatre enfants naîtront de leur union : Sylvain, en 1999, puis Benoît, Pauline et enfin Alice, en 2003. Nouvelle étape en 2008. Frédéric et Marie quittent la grande ville pour la campagne, à Four, à huit kilomètres de Bourgoin-Jallieu, où ils font construire une maison. Frédéric change d’univers professionnel et est embauché, son permis poids lourd en poche, par les établissements Gachet. Ces derniers cherchent un chauffeur de camion toupie, spécialisé dans le transport du béton frais.

Association d'anciens

Bien remplie, la vie professionnelle de Frédéric ne l’empêche pas de penser à tous ses amis d’Apprentis d'Auteuil avec lesquels il est resté en lien. Et à trois d’entre eux en particulier, des vrais frères, avec lesquels il part chaque année en vacances en famille. "Nous avons monté une association d’anciens de Jean-Marie Vianney en 1999, d’abord pour se retrouver, puis pour venir en aide à ceux qui avaient des difficultés. Chaque année, nous organisons un chantier au cours duquel on se retrousse les manches en donnant de notre temps. Nous faisons des travaux dans l’établissement. C’est du concret !" Fort de cette expérience, Frédéric a remonté le club de football de la commune qui comprend aujourd’hui 130 licenciés. "J’aime rendre service, conclut-il. Apprentis d’Auteuil m’a sauvé la vie. A mon tour de redonner ce que j’ai reçu."