Education et scolarité

Les atouts de l'école maternelle

Spécificité française, l’école maternelle accueille gratuitement les enfants âgés de 3 à 6 ans. Une étape importante pour la suite de la scolarité, où se mettent en place de nombreuses compétences. Gros plan sur les maternelles à Apprentis d’Auteuil.

Des années clés

Les élèves de l'école Poullart des Places (Orly, 94) se rassemblent pour faire le point sur la date, la météo, les activités de la journée. (c) Besnard/Apprentis d'Auteuil
Les élèves de l'école Poullart des Places (Orly, 94) se rassemblent pour faire le point sur la date, la météo, les activités de la journée. (c) Besnard/Apprentis d'Auteuil

À Apprentis d’Auteuil, les classes maternelles sont proportionnellement peu nombreuses par rapport aux niveaux collège ou lycée, mais elles bénéficient d’une attention toute particulière. « Agir dès la maternelle, c’est un premier niveau de prévention, explique Christine Rossignol, responsable du pôle Scolarité et Prévention du décrochage scolaire. Une grande part du décrochage commence dès la grande section… En jeu, le langage, le manque de vocabulaire, la socialisation plus ou moins aisée de l’enfant, mais aussi son histoire et celle de sa famille par rapport à l’école. L’objectif est que des enfants socialement et culturellement loin de l’école accrochent bien dès la maternelle, qu’ils comprennent bien le sens des apprentissages et le « métier d’élève. »

Quelques chiffres

- 8 écoles maternelles à Apprentis d'Auteuil
- Environ 500 enfants scolarisés
- 2 ans 1/2 à 6 ans : l'âge des enfants, de la très petite à la grande section

 

Apprendre en jouant

Tout passe par le jeu. Ici, à l'école Saint-Gabriel (Bagneux, 92) (c) JP Pouteau/Apprentis d'Auteuil
Tout passe par le jeu. Ici, à l'école Saint-Gabriel (Bagneux, 92) (c) JP Pouteau/Apprentis d'Auteuil

« En maternelle, tout passe par le jeu, souligne Bénédicte Sellier, professeur des écoles à l’école Poullart des Places d’Orly (94), le graphisme, le dénombrement, la motricité… Ces années sont fondamentales pour un bon départ dans la vie scolaire. On y apprend beaucoup de choses, dont la première, devenir un élève.» Dans cette classe unique (moyenne et grande section, soit des enfants âgés de quatre à six ans), la grande majorité des élèves est aussi confiée à la Maison d’enfants toute proche.
Le petit groupe des moyens part pour la séquence quotidienne de motricité dans le gymnase voisin : un jeu de relais. Mais David est désespéré : certains de ses coéquipiers ne sont pas très impliqués, marchent au lieu de courir. Il s’énerve, bouscule les autres, part bouder dans son coin… « Les jeux de coopération sont très utiles, explique l’enseignante. Il leur faut apprendre à partager, à attendre son tour, à s’écouter. Certains enfants le supportent plus difficilement. On apprend aussi ici à vivre ensemble. »

Pédagogie adaptée

A l'école Joie de Vivre (Strasbourg, 67) (c) Besnard/Apprentis d'Auteuil
A l'école Joie de Vivre (Strasbourg, 67) (c) Besnard/Apprentis d'Auteuil

Située dans un quartier populaire, l’école Joie de Vivre (Strasbourg, 68) scolarise 80 élèves en maternelle avec une grande mixité sociale. L’école applique la pédagogie du père Faure, comme l’explique Myriam Dursus, la directrice : « Elle s’inspire de celle de Maria Montessori. Ses principes : le choix des activités par les élèves, la manipulation d’objets autant de fois qu’ils le veulent, l’erreur, qui n’est pas considérée comme une faute. Une fois l’activité réalisée, les élèves se rassemblent pour échanger ensemble. »
Dans la classe des moyens, divers ateliers : là, les enfants coupent du potiron pour faire une soupe, là, ici, un enfant s’exerce à reproduire un motif fait de pièces de bois de formes et de couleurs différentes, qu’il doit enfiler sur une longue tige…  « Grâce à la pédagogie du père Faure, les enfants acquièrent plus vite une autonomie, précise la directrice. Ils s’autoévaluent, se rendent compte de leur progrès. Ils avancent à leur rythme, apprennent en s’amusant. Autre point important, aider l’enfant à construire son intériorité. »

Faire progresser les comportements

À l’école Saint-Etienne à Saint-Estèphe (33), la classe unique de maternelle applique les méthodes Montessori et Freinet. Les objectifs : un travail autour de l’autonomie de l’enfant, de sa confiance en soi. « Il y a beaucoup de manipulation à travers les jeux ou le jardin (on sème et on récolte), les mathématiques, explique Emmanuelle Barsot, la directrice. Les enfants ont l’impression de jouer mais on est bien dans les apprentissages. » Originalité de l’école, des ceintures de comportement, appelées « petits poussins » et « oursons », décernées suivant l’attitude de l’enfant. « Elles ont beaucoup fait progresser les comportements », reconnait la directrice.

Les liens avec la famille

Le café des parents de l'école Saint-Gabriel (Bagneux, 92) (c) JP Pouteau/Apprentis d'Auteuil
Le café des parents de l'école Saint-Gabriel (Bagneux, 92) (c) JP Pouteau/Apprentis d'Auteuil

Direction l’école Saint-Gabriel de Bagneux (92). Réunies pour un café des parents avant chaque départ en vacances, les familles apprécient ce moment convivial. « Les familles sont de vrais points d’appui, rappelle Carole Lameloise, la directrice. L’enfant se retrouve dans cette relation de confiance établie avec ses parents. » Yamina François, maman de cinq enfants scolarisés de la maternelle au collège, est très satisfaite : « Ici, les enfants apprennent à s’accepter et à accepter les autres. C’est une richesse. »
Suivre pas à pas son enfant, ses progrès, pas si facile pour des parents éloignés de l’univers scolaire. « Nous avons aussi un rôle d’écoute, de conseil éducatif et de conseil dans les démarches », affirme Emmanuelle Barsot.
 « Le travail avec les familles passe d’abord par un cahier de vie qui est le lien entre l’école et la famille, explique Myriam Dursus. Il sert aussi de support pour le travail autour du langage en classe à partir de ce que vivent les enfants chez eux. » La réforme de l’école maternelle, mise en place il y a un an, a institué un cahier de réussites. « Celui-ci montre concrètement que les enfants progressent et avancent à leur rythme dans les apprentissages », reprend Myriam Dursus.
« La maternelle est une classe à part qui prend en compte l’âge et la maturité des enfants », conclut Loïc Leporcq, directeur de l’école Poullart des Places.

Le point de vue de Viviane Bouysse, inspectrice générale de l'Education nationale

 

Quels sont les atouts de l’école maternelle en France ?Création originale du système éducatif français, la fonction première de l’école maternelle est d’accueillir tous les enfants gratuitement, dans un milieu encadré, pour une période de trois ans. Ce qui leur donne le temps d’être stimulés dans leurs développements cérébraux, loin d’être finis à cet âge. Une grande place est laissée aux jeux, aux activités manuelles ou artistiques, à la motricité, avec une priorité au langage oral dans toutes ses dimensions, indispensable pour faciliter l’entrée dans la culture de l’écrit. Ce temps est vraiment fait pour que l’enfant ose se lancer dans l’inconnu des apprentissages, sans contrainte, avec l’envie d’y revenir et le plaisir d'apprendre. C’est un moment essentiel pour un bon accrochage scolaire, d’autant plus pour les enfants les plus en difficulté. L'école maternelle a un vrai rôle à jouer pour réduire les conséquences scolaires de problèmes socioculturels et langagiers dont elle n'est pas l'origine. Qu’apporte la récente réforme de l’école maternelle ?
J’insisterais avant tout sur la priorité donnée à une approche plus positive des enfants et à une école maternelle « bienveillante », qui doit « donner envie d’apprendre ». L’idée est bien, pour les enseignants, de montrer davantage à leurs élèves les progrès qu’ils font, leurs avancées, leurs changements, leurs capacités, avec la possibilité de se tromper pour mieux apprendre. Chacun avance et se développe, mais à son rythme et en tâtonnant. Un atout majeur pour la suite de la scolarité.