Ismail Rahaoui, un jeune pour booster les jeunes des quartiers

l y en a qui sont doués pour ça. Aller vers les autres, gagner leur confiance, créer du lien pour faire du bien… Chez Ismail, 30 ans, c’est une seconde nature. Mieux que ça : c’est vital ! A Tarascon, le garçon est connu des services, comme on dit. Mais pas pour les raisons que l’on croit. C’est un jeune ressource au cœur des quartiers populaires, au service des ceux qui y habitent. Et y triment, souvent. Alors, forcément, sa rencontre avec Apprentis d’Auteuil, c’était écrit.

Allumage des boosters

Ça se passe en 2017. « A l’époque, j’avais 24 ans et un master en Politiques sociales, raconte Ismail. En parallèle d’un travail d’assistant d’éducation, j’avais créé une petite entreprise de soutien scolaire avec cours particuliers à domicile. Ça s’appelait Prof’Adom. » La responsable « Politique de la Ville » le convie à une réunion de présentation d’un nouveau dispositif à l’initiative d’Apprentis d’Auteuil. Nom de code : Impact Jeunes. Ambition : proposer un programme d’actions inédit invitant les jeunes des quartiers prioritaires, âgés de 13 à 30 ans, à passer de l’envie à la réussite, en les accompagnant à toutes les étapes de leur parcours d’insertion professionnelle. C’est le coup de foudre. « J’ai adoré l’approche systémique du projet. Avec Impact Jeunes, pas de solutions toutes faites, mais une démarche 360° adaptée à la problématique de chaque jeune. J’ai tout de suite adhéré et voulu aider à mon petit niveau. » Ni une, ni deux, Ismail est embauché au poste de « booster territorial » pour travailler, au sein d’Impact Jeunes, à faire ce qu’il sait faire le mieux : aller à la rencontre des jeunes en galère, les motiver pour avancer et fédérer localement les acteurs publics et privés du Pays d’Arles, pour construire ensemble des réponses sur mesure vers l’emploi.

Un jeune à impact

Et ça fait six ans que ça dure ! Six ans qu’Ismail sillonne le territoire provençal comme un poisson dans le grand bain de l’insertion professionnelle. « On est ce fil rouge qui relierait le jeune et tous les acteurs territoriaux engagés au service de l’emploi. En identifiant les jeunes qui veulent s’en sortir, en les accompagnant pour définir avec eux une réponse adaptée, soit en les orientant vers des dispositifs existants, soit en faisant appel aux bons interlocuteurs afin de coconstruire une solution personnalisée. »

Depuis la création d’Impact Jeunes, ce sont plus de cent projets qui ont été initiés et financés dans le Sud-Est, pour plusieurs milliers de jeunes bénéficiaires. En 2022, Ismail est passé « référent » pour les sept boosters que compte désormais le dispositif Impact Jeunes. Ces derniers peuvent ainsi s’appuyer sur sa vision d’ensemble des différents quartiers d’intervention pour monter des projets en commun. « Le matin, vous motivez un jeune, l’après-midi, vous présentez un projet à une entreprise et le soir, vous êtes reçu par une institution…. Il faut être un peu polyglotte, confirme Ismail, et parler la langue de chacun. »

Changer le regard sur les jeunes des quartiers

« Mais on n’est pas non plus superman ! », prévient-il. Qu’on soit « booster » ou référent, on ne peut pas changer les choses tout seul. « C’est en mettant les gens en relation, qu’on arrive à imaginer des réponses collectives, insiste le jeune homme, dans le cadre d’une approche centrée sur le besoin pour stimuler une ingénierie de projets qui associe les bonnes compétences. » Et progressivement, les lignes bougent. « Aider les jeunes à trouver du travail, c’est bien, explique Ismail. Mais cette dynamique doit aussi contribuer à changer les regards sur leurs quartiers d’origine. » Comme à Arles, avec le projet « Pourquoi lui et pas moi ? » lancé à l’initiative de jeunes filles voulant sensibiliser le monde de l’entreprise à l’égalité homme-femme, en partenariat avec le Centre social Trebon et l’Adap13. Le jeune homme de terrain croit dur comme fer à cet effet de contagion positive. La preuve, selon Ismail ? « Quand on trouve une solution pour un jeune, c’est toute une famille dont les tensions sont apaisées. » De quoi donner encore un peu plus de cœur à l’ouvrage à ce jeune papa, qui dit se lever chaque matin avec un objectif : « Sur chaque visage que je rencontre, dessiner un sourire ».