Protection de l'enfance

Joël, 18 ans : « J’ai eu la chance d’être aidé »

Jeune sortant de la Maison d'enfants La Trinité à Saint-Benoît (La Réunion), Joël, 18 ans, ne remerciera jamais assez les éducateurs dont Julien Duperey, éducateur spécialisé, de l'avoir accueilli et accompagné dans son quotidien et dans ses rêves. Interview croisée.

Joël : "Je n'ai jamais abandonné !"

« Avec ma sœur jumelle Joëla, nous avons connu la pauvreté à Madagascar et la maltraitance dans plusieurs familles à Mayotte et à La Réunion. Mais je n’ai pas le droit de me plaindre, car nous avons eu la chance d’être accueillis, en octobre 2019, à la Case Soleil, l’unité des fratries d’Apprentis d’Auteuil à La Réunion. J’ai eu le baccalauréat Sciences et technologies de l’industrie et du développement durable avec la mention assez bien, grâce aux éducateurs. Ils m’ont appris le français et donné des cours particuliers en physique-chimie.
En janvier 2021, j’ai rejoint l’Unité d’adolescents, un internat à Saint-Benoît. Je savais que je devais bien cheminer pour espérer obtenir la nationalité française et préparer une licence pour devenir professeur d’éducation physique. Malheureusement, on m’a découvert une insuffisance respiratoire.
Aujourd’hui, je rêve de devenir sous-officier dans la gendarmerie. Pour ça, je prépare sérieusement le concours d’entrée sur Internet. J’ai aussi un plan B : passer un brevet de technicien supérieur agricole qui me permettrait d’être architecte paysagiste.
Ma plus grande fierté ? Avoir obtenu la nationalité française le 15 juin 2021, avec ma sœur et ma maman. Je n’ai jamais abandonné. J’ai eu la chance d’être aidé. Je suis toujours resté dans ce projet, dans ce rêve. »  

Julien Duperey : "J'ai essayé de transmettre l'espoir à Joël"

« Dans un parcours de vie difficile, entre pauvreté et maltraitance, j’ai essayé de transmettre l’espoir à Joël : « Aujourd’hui, serre les dents. Ça ira mieux demain. Ne te focalises pas sur le négatif. Apprends à être résilient. » Dès son arrivée à l’Unité d’adolescents, nous nous sommes appuyés, entre éducateurs, sur les valeurs – politesse et volonté, notamment – transmises par sa maman. Avec ces bonnes bases, nous pouvions le faire avancer. Joël n’a jamais été en rébellion. Il a toujours été à l’écoute des adultes et dans le désir d’apprendre. Par exemple à bien à formuler une demande, à chercher une information. Il s’est toujours intéressé aux activités proposées : VTT, cours de cuisine, etc. Nous avons soutenu Joël dans ses démarches pour sa naturalisation. En sachant que le jour de ses 18 ans, si nous n’obtenions pas une dérogation auprès des services sociaux du département pour prolonger son accompagnement jeune majeur, il se retrouverait à la rue, sans toit ni possibilité d’évoluer et de réaliser ses rêves.
En mars 2021, nous lui avons proposé un appartement éducatif où il pourrait sortir du collectif et gagner en autonomie. Un défi relevé puisqu’aujourd’hui Joël dispose d’un logement au CROUS comme n’importe quel autre étudiant d’université. Ma plus belle réussite ? Joël a suivi son propre chemin, par choix et non par défaut. S’il a besoin de moi, je suis là. »