Témoignages

Gaël Durbin, un bon petit diable devenu ingénieur

De dernier de la classe, Gaël Durbin s’est hissé au rang des premiers après deux ans passés au lycée professionnel Sainte-Thérèse d'Apprentis d'Auteuil à Paris. En transformant sa passion pour l’informatique en métier, il s’est ouvert un univers qui le fait voyager dans le monde entier.

"Je n’ai pas le profil type d’un jeune orphelin d’Apprentis d’Auteuil, reconnaît Gaël Durbin presque gêné. Je suis né dans les beaux quartiers de Paris, mes parents me voyaient ingénieur ou médecin. Mais aujourd’hui, vingt-cinq ans après mes deux années au lycée professionnel Sainte-Thérèse - de 1992 à 1994 - je peux dire que la fondation m'a repêché. Moi, un adolescent mal dans sa peau, qui avait de mauvaises notes, au grand désespoir de mes parents, qui ne savait pas ce qu’il voulait faire plus tard. La fondation a changé ma vie !"
Pensionnaire au collège puis au lycée Saint-Charles d’Athis-Mons, le jeune Gaël redouble sa 4e. Il passe en 3e puis en 2nde, mais les études lui pèsent et les résultats ne suivent pas. "J’aimais les matières scientifiques et je passais des heures à apprendre le latin ! Il n’y avait que le basket qui m’intéressait. Michael Jordan - la star des Chicago Bulls - était mon idole. Sinon, je dévorais les livres d’informatique durant les heures d’études. Je n’avais aucune idée pour mon orientation. Je savais juste que je voulais faire quelque chose de technique ou de manuel. Mon père, né à Dakar, avait entendu parler de Daniel Brottier qui avait levé des fonds pour la construction de la cathédrale de Dakar, et dirigé la fondation de 1923 à 1936. Il a demandé un rendez-vous à Pierre Sellier, directeur du lycée Sainte-Thérèse."
Pierre Sellier reçoit Gaël et son père et annonce à l’adolescent : "Je te prends en première pour préparer le baccalauréat F2 destiné aux élèves qui s’intéressent à l’électronique..." "Sans doute parce que j’avais de bonnes notes en physique !" analyse Gaël Durbin.  

Des jeunes de toutes origines

D’emblée, Gaël Durbin se sent bien dans son nouveau lycée. "Les profs m’ont impressionné. Ils venaient du monde de l’industrie pour partager leurs connaissances et leurs expériences avec des jeunes de toutes origines, de tous âges. Ils étaient très compréhensifs. Les salles de cours étaient bien équipées avec des oscilloscopes très performants. Et l’entente entre garçons était exceptionnelle. Je me souviens de Vietnamiens qui ne parlaient pas un mot de français mais qui étaient très doués en maths. Nous nous entraidions."
Autres souvenirs heureux pour Gaël : "Une semaine de ski à la maison d’Auteuil à Servoz, dans une ambiance colonie de vacances. Ma rencontre avec Cédric de Minac, un orphelin dont je suis devenu l’ami et le parrain de son fils. Et les deux étés où j’ai participé à des travaux de démolition à Sainte-Thérèse pour me faire de l’argent de poche. Je travaillais huit heures par jour et suais à grosses gouttes."
Plus heureux, mieux dans sa peau, le lycéen se classe parmi les premiers et obtient son baccalauréat avec mention assez bien. "En réalité, je me mettais moins la pression. Avant, j’avais peur d’échouer aux yeux de mon père, crack en mathématiques appliquées. Du coup, tout allait mieux pour moi et pour nous deux. Aujourd’hui, je ne fais grief de rien à personne, ni à ma famille ni à l’établissement de prestige où j’ai été scolarisé de 6 à 13 ans, si ce n’est pour leur dire qu’être le dernier de la classe ne signifie pas être un petit diable !"  

Une voie royale dans l’informatique

Son bac en poche, Gaël prépare un Diplôme universitaire de technologie (DUT) en génie électrique et informatique industrielle à l’IUT de Cachan et poursuit son chemin de connaissances avec une licence, une maîtrise et un Diplôme d’études approfondies (DEA) à l’Université Pierre et Marie Curie. Avant de faire son service militaire au Fort du Kremlin-Bicêtre, la référence informatique pour l’Armée de terre, et d’être engagé par Quartz Data Systèmes, une entreprise de services du numérique. "C’était l’époque, au début des années 2000, où les sociétés informatiques embauchaient à tout va."
Gaël enchaine trois postes. En 2006, il entre chez Siemens où il est engagé en CDI un an et demi plus tard. "Je conçois les outils de maintenance des pilotes automatiques des métros d’Alger, de Barcelone et, actuellement, de New York, dans les trains et au sol. Afin que les régies de transport s’assurent que tout fonctionne bien. Au siège de la société, j’utilise des outils de simulation pour tester les lignes de métro avant qu’elles ne soient installées. Ou bien, je suis amené à reproduire et solutionner les éventuels problèmes une fois le service lancé. À New York, le projet concerne 300 trains !"
À 43 ans, Gaël Durbin a toujours l’informatique chevillée au corps, la même envie de bien faire, de ne rien rater et, depuis 2014, un visa de travail pour les États-Unis qui lui donne des ailes. "Si je ne prends pas l’avion tous les 3-4 mois, je suis mal. Le voyage me permet de couper les ponts, d’apprendre plus encore sur site et de m’améliorer."

Donner l'envie de travailler

En avion, pour ses loisirs, Gaël part aussi pour de lointaines destinations : Népal, Ladakh, Californie, Alaska, Islande, Norvège, Svalbard, Maroc, Afrique du Sud… "J’adore randonner en haute altitude ou sur des terres isolées dans une espèce de road-trip." À vélo, il se "contente" d’avaler 400 kilomètres par mois, entre son domicile et son lieu de travail. "Aujourd’hui, j’exerce un métier qui me plaît dans une société qui m’ouvre de nombreuses portes et je ne me fais pas trop de souci pour mon avenir. Alors j’aimerais dire aux jeunes qui, comme je l’ai été, sont les derniers de la classe, que ça vaut vraiment le coup de travailler. On peut ainsi exercer le métier qui nous plait et ne rien regretter !"