Formation et insertion

Apprentissage : l'accompagnement éducatif est la clé de la réussite

Alors que les principaux axes de transformation de l’apprentissage ont été présentés au mois de février par le Premier ministre Edouard Philippe, zoom sur un dispositif original d'accompagnement des apprentis initié en 2010 à Strasbourg par Apprentis d’Auteuil et repris en Alsace et Champagne-Ardennes : la création d'un poste d’éducateur à temps plein auprès des jeunes en difficulté en vue d'éviter les trop fréquentes ruptures de contrat.

Ce mardi matin, les quatorze apprentis en 1ère année de CAP Agent polyvalent en restauration (APR), ouvert par Apprentis d’Auteuil à Schiltigheim en 2010, sont attendus à 8h au lycée Charles de Foucauld. 12 sont présents, le treizième a prévenu de son absence pour motif médical. Sans nouvelles du quatorzième, Émile Bronquard, l’éducateur, lui téléphone. Le jeune s’était endormi à l’arrêt du bus. Il arrive, une fois de plus, sans ses affaires

Éviter les ruptures de contrats d’apprentissage

un éducateur auprès des apprentis, un apprenti 1ère année de CAP sert les clients du restaurant d'application de Schiltigheim, UFA d'Apprentis d'Auteuil (c) JP Pouteau / Apprentis d'Auteui
Un apprenti en 1ere année de CAP sert les clients de la brasserie d'application, UFA d'Apprentis d'Auteuil à Schiltigheim (c) JP Pouteau / Apprentis d'Auteuil

Passer un CAP par la voie de l’alternance, c’est toute une discipline. Les apprentis alternent une semaine en centre de formation avec deux à trois semaines d’affilée en entreprise. Ils sont avant tout des salariés qui doivent faire preuve de savoir-être et de savoir-faire. Dans les métiers de l’hôtellerie-restauration, réputés difficiles, (rythmes, horaires, exigences liées à la clientèle…), un contrat d’apprentissage sur deux est rompu avant son terme ! Pour contrer ce risque, d’autant plus élevé dans le cas de jeunes vulnérables, Apprentis d’Auteuil a doté sa formation APR d’un atout essentiel, un éducateur à plein temps. « Son rôle : suivre chaque apprenti dans ses relations avec son employeur, l’équipe pédagogique et, si nécessaire, sa famille. Il le prépare à ce qui l’attend dans le monde du travail, l’accompagne pas à pas, et si la tension est telle qu’une rupture arrive, l’aide à rebondir », explique Aurélien Maignant, responsable du dispositif.

Un accompagnement éducatif des apprentis

Un éducateur auprès des apprentis, l'éducateur Emile Bronquart en entretien avec un apprenti (c) JP Pouteau / Apprentis d'Auteuil
L'éducateur Emile Bronquart en entretien avec un apprenti (c) JP Pouteau / Apprentis d'Auteuil

Pour que les apprentis mettent toutes les chances de leur côté, l’éducateur se positionne comme un "coach" : « Dans les entretiens préalables à leur admission, nous passons un contrat moral : ils acceptent que je les accompagne même si ce sera parfois difficile, et je m’engage à les soutenir dans leur détermination à avoir leur CAP. Je suis dans l’empathie active : je comprends leurs difficultés, mais ne cherche pas à leur trouver des excuses. Mon travail est de leur donner du courage, de les booster quand ils ont décidé d’avancer, voire de les secouer pour qu’ils dépassent la difficulté du moment. » Ajoutant: « Nous travaillons avec des employeurs en phase avec notre mission et parlant de la même façon que nous aux jeunes. Ceux qui nous connaissent n’hésitent pas à m’appeler dès qu’un problème se pose. » Cet accompagnement éducatif personnalisé est renforcé, en cas de besoin. Et si une rupture de contrat s’avère inéluctable (et parfois bénéfique), la mission d’Émile Bronquard ne s’arrête pas là. « Nous devons sécuriser le parcours de formation du jeune. L’enjeu est de ne pas le lâcher, de lui permettre de rebondir vers une autre entreprise, une autre formation… », insiste Aurélien Maignant.

Un soutien à l'apprentissage repris par le conseil régional

« Les bonnes années, nous évitons 90% de décrochage sur un secteur où il y en a habituellement 50% », relève Aurélien Maignant. Cela a attiré la curiosité du conseil régional (financeur d’une partie du coût de fonctionnement des CFA, l’autre l’étant par la taxe d’apprentissage), et de CFA publics et privés. Apprentis d’Auteuil a donc expérimenté en 2015 la mise à disposition d’éducateurs auprès de quatre CFA pilotes en Alsace. « En 2016-2017, les difficultés se sont aplanies pour la majorité des 250 jeunes suivis. Sur les 60 jeunes dont le contrat a été rompu, les deux tiers ont été accompagnés vers des suites positives (nouveau contrat, emploi, réintégration dans un lycée). » Ces bons chiffres ont amené la région à étendre l’expérimentation : en octobre 2017, Apprentis d’Auteuil est retenu pour mettre en œuvre un projet de "sécurisation du parcours des apprentis" dans 15 CFA partenaires en Alsace, et 4 à 6 CFA en Champagne-Ardennes. Une démarche d’équipe avec à la clé, l’insertion professionnelle des jeunes !