Plaidoyer
09 février 2018

Mineurs non accompagnés : les engagements d'Apprentis d'Auteuil

Les mineurs non accompagnés (MNA) sont de plus en plus nombreux sur le territoire français. Dans ce contexte, Apprentis d’Auteuil rend public ses engagements vis-à-vis de ces jeunes venus d’ailleurs, sans famille ni soutien capables de s’occuper d’eux. Isabelle David Lairé, directrice régionale nord-ouest, explique la démarche.

Pourquoi Apprentis d’Auteuil se positionne-t-il maintenant sur le sujet des MNA ? 

Apprentis d’Auteuil est régulièrement sollicité par les services départementaux, interpellé par le gouvernement pour partager son expérience de terrain, ou encore par les équipes elles-mêmes qui se questionnent sur l’accompagnement le plus adapté à ces jeunes. Face à ces interrogations, il nous semblait nécessaire d’éclaircir notre politique en matière d’accueil des mineurs non accompagnés.

A Apprentis d’Auteuil, l’accueil des MNA est lié à notre histoire, à notre volonté d’accueillir les jeunes les plus en difficulté, à notre conviction que notre projet correspond à ce dont ces jeunes ont besoin. Ces jeunes MNA sont pris en charge par la protection de l’enfance. C’est à ce titre que les services sociaux nous les confient, car notre projet éducatif - en particulier, notre expérience et notre savoir-faire dans les domaines de l’éducation, de la formation et de l’insertion – font de nous un acteur particulièrement pertinent. Face à l’augmentation du nombre de MNA sur notre sol, notre fondation – œuvre d’Eglise reconnue d’utilité publique - répond aussi à l’appel de l’Église, manifestée par le pape François. Mais si ces jeunes ont besoin d’être protégés, ils ont aussi des besoins spécifiques.

Quels sont ces besoins spécifiques?

Ils ont besoin, en premier lieu, du gîte et du couvert pour vivre de manière décente et sécurisée. D’un bilan de santé particulièrement poussé et d’un accès à leurs droits. D’un apprentissage de la langue, qui doit être mené très rapidement pour qu’ils intègrent des formations. Mais aussi d’un apprentissage des savoirs et des codes de base de la société française. Sans oublier l’accompagnement à l’insertion sociale et professionnelle, sur les documents administratifs, les régularisations.
Notre engagement à leur égard, c’est de leur donner les clés pour pouvoir réussir leur vie et tisser du lien avec leur environnement. Notre travail avec des bénévoles, des parrains - tout un réseau amical - les y aide également.

Quels sont les principaux engagements d’Apprentis d’Auteuil ?

Le premier concerne notre volonté de travailler en amont, en lien avec les acteurs associatifs, auprès des MNA en errance, en situation de rue ou vivant dans des squats. Nous sommes très inquiets face à l’augmentation du nombre de ces jeunes. Nous sommes également préoccupés par la question d’un éventuel transfert de compétences des départements à l’État concernant les missions de mise à l’abri et d’évaluation. Nous craignons que la recherche de compétences éducatives pour accueillir ces jeunes passe au second plan, alors que l’on sait combien la qualité du premier accueil est primordiale pour ces adolescents qui ont eu des parcours compliqués, voire traumatisants. Nous resterons vigilants pour que ces missions restent dans le cadre de la protection de l’enfance.
 

Quelles sont les positions d'Apprentis d'Auteuil sur les prises en charge éducatives ?

Un jeune MNA travaille son français dans son foyer (c) PBesnard/Apprentis d'Auteuil
Au foyer Rosa Parks de Thiais, un jeune MNA travaille son français (c) PBesnard/Apprentis d'Auteuil

Pour nous, l’accueil au titre de la protection de l’enfance va bien au-delà d’un hébergement. Les MNA ont besoin d’un véritable accompagnement éducatif, en plus du gîte et du couvert, adapté à leurs spécificités et leurs besoins. Cela implique une disponibilité dans la relation éducative. Parallèlement au travail avec des réseaux de bénévoles, de parrains, de tuteurs, des compétences professionnelles sont nécessaires pour accompagner ces jeunes. Nous ne pouvons pas brader notre prise en charge éducative. Aussi, pour chaque appel à projet, nous examinons les conditions posées par le département – économiques en particulier – pour voir si elles vont nous permettre de respecter notre engagement de qualité de prise en charge éducative. Au cas contraire, nous déclinons l’appel à projet.

Et sur la situation administrative pendant la minorité, et au moment du passage à la majorité ?

Les jeunes nous arrivent en majorité entre 16 et 18 ans. Nous rappelons dans cette note les obligations de l’État. Les textes existants doivent permettre aux jeunes de régulariser leur situation administrative afin d’être scolarisés en formation professionnelle ou d’entrer en apprentissage. On observe une grande disparité d’application des textes selon les territoires. Les MNA se heurtent à des freins, cela les fragilise. Nous souhaitons qu’ils puissent se former et aller au bout de leur formation. À cela s’ajoute la situation particulière des MNA dans les Outre-mer, en particulier en Guyane et à Mayotte, pour laquelle nous demandons une réflexion spécifique.

Et en ce qui concerne les obligations de quitter le territoire français (OQTF) ?

Nous nous sommes prononcés de manière assez claire : nous accompagnons les jeunes MNA dans l’ensemble de leurs démarches administratives, y compris lorsqu’une OQTF arrive, en lui expliquant la situation et la mesure dont il est l’objet. Avec une intention de notre part, dans le cadre de notre accompagnement éducatif, d’assurer sa protection et sa sécurité, y compris dans le cas d’une intervention des forces de l’ordre. Dans le cadre d’une OQTF on peut aussi accompagner le jeune dans la contestation, pour faire valoir ses droits. .

Les chiffres 2018 au sujet des mineurs non accompagnés en France
Les chiffres 2018 au sujet des mineurs non accompagnés en France