Education et scolarité
30 juin 2015

Aurélie, 14 ans, combat ses addictions

Aurélie, 14 ans, est accueillie en 2009 dans un internat d’Apprentis d’Auteuil. Son comportement violent et addictif est révélateur d’un profond mal-être et d’une relation troublée avec sa mère. Récit.

Aurélie (1), 14 ans, arrive à l’internat éducatif et scolaire d’Apprentis d’Auteuil à la rentrée 2009 sur les conseils de l’assistance sociale qui suit la famille. « Elle était souvent livrée à elle-même compte tenu des horaires de sa maman qui travaillait dans une brasserie », se souvient son éducatrice. Scolarisée en 4ème au collège de la fondation dont dépend  l’internat, Aurélie s’en sort plutôt bien, en dépit de quelques difficultés au niveau scolaire. C’est son attitude qui inquiète le plus les enseignants, car elle renvoie l’image d’une jeune fille mélancolique, voire dépressive.
Les premiers mois se passent bien. Mais l’équipe éducative apprend que le week-end, lorsqu’elle rentre chez elle, la jeune adolescente consomme tabac, alcool et cannabis en grande quantité, sans que sa mère s’en émeuve. Cette mise en danger est révélatrice d’un profond mal-être. Et d’une relation troublée avec sa mère qui la prend comme confidente et la considère comme une adulte.

« J’existe, occupez-vous de moi !"

« Aurélie disait qu’elle l’aimait profondément et dans la même phrase, qu’elle lui en voulait de la laisser seule. Le papa étant très malade, elle ne le voyait pas non plus.» L’équipe éducative se fait aider par l’infirmière de l’établissement et par une association locale spécialisée dans les addictions. "Elle se mettait parfois dans un état de grande excitation. Elle tenait aussi des propos violents. Ces comportements excessifs étaient un moyen de dire: « J’existe, occupez-vous de moi !" L’équipe travaille pendant plusieurs mois pour instaurer un climat de confiance. « Nous faisions en sorte de valoriser ses résultats scolaires et d’être à son écoute lorsqu’elle n’allait pas bien. » Aurélie est également suivie par un psychiatre. De son côté, sa mère continue de minimiser la situation. « Nous avons fait tout un travail également avec elle pour lui faire comprendre qu’Aurélie était encore jeune et avait besoin d’un cadre. » 

Découverte d'une autre culture

Au fil des mois, Aurélie parvient à réduire ses addictions. Son projet professionnel se dessine. À la fin de la 3ème, elle décide de faire un CAP peinture au lycée professionnel situé sur le même site. Puis, à l’été 2012, elle part pour un chantier de solidarité international de trois semaines au Bénin. "Lui confier la responsabilité des travaux de peinture l’a responsabilisée et l’a valorisée », se souvient l’éducatrice. Aurélie découvre aussi une autre réalité : « Lorsqu’un jeune Béninois lui a expliqué qu’il marchait une heure trente pour aller à l’école, cela lui a ouvert les yeux sur sa situation en France." L’année suivante, Aurélie obtient son CAP. "Elle est devenue une jeune femme beaucoup plus apaisée. Puis elle a quitté la fondation pour préparer un brevet professionnel dans sa branche. Elle revenait de loin, car à un moment elle aurait pu basculer dans la délinquance. Tout n’a pas été réglé d’un coup de baguette magique, mais elle avait un élan de vie très fort." Aujourd’hui, Aurélie a 18 ans et envisage de s’installer dans son propre appartement.  (1) Dans un souci de confidentialité, le prénom a été changé. Les lieux ne sont pas identifiés et le témoignage des professionnels reste anonyme.