Accueillie à 16 ans en Maison d'enfants, Aïda reprend confiance
En août 2013, Aïda, 16 ans, est confiée par les services sociaux à une Maison d’enfants d’Apprentis d’Auteuil. Elle va parcourir un long chemin avant de pouvoir s’ouvrir à nouveau aux autres et leur accorder sa confiance. Le récit de son évolution vers l'épanouissement et l'autonomie.
« Elle était très méfiante vis-à-vis des adultes comme des jeunes, car son ancienne référente ASE (2) était partie du jour au lendemain, sans explication, se souvient la cheffe de service éducatif. Aïda avait vécu ce départ sec comme un abandon, une trahison. Elle disait : « Je ne vais pas me confier aux adultes, cela ne sert à rien. Et je ne suis pas là non plus pour me faire des copines… »
Une situation familiale douloureuse
D’année en année, Aïda s’est forgé une carapace. Sa situation familiale est douloureuse : sa maman, qui souffre de problèmes psychologiques, a purgé il y a quelques années une peine de prison pour infanticide.Ses parents étant séparés, Aïda va alternativement le week-end chez sa mère et son père. Mais elle peine à trouver sa place chez ce dernier qui, depuis, a refait sa vie. « Nouvelle femme, nouveaux enfants, beaucoup de passage à la maison… Et surtout, un papa qui s’investit peu dans la relation, souligne l’éducatrice.
De son côté, la maman est toujours très fragile. Aïda assumait beaucoup de tâches à la maison. Conséquence, elle pouvait être très exigeante à la Maison d’enfants vis-à-vis des adultes. De façon malhabile, elle nous disait : « Vous êtes là pour moi, ce lieu m’est dédié ! »
Aïda fait beaucoup de cauchemars la nuit. L’équipe engage tout d’abord un travail pour calmer ses angoisses. Elle accepte, non sans réticence, l’aide d’une psychologue. Elle doit aussi se conformer aux règles, notamment aux horaires d’entrée et de sortie.
Ses débuts en bac pro accompagnement, soin et services à la personne sont chaotiques : Aïda sèche les cours, décroche. Mais grâce au suivi de ses éducateurs, en lien avec le lycée professionnel, elle se ressaisit, et en un trimestre, se remet sur les rails.
À la Maison d’enfants, elle passe progressivement du foyer classique à l’appartement en semi-autonomie. Là, les jeunes filles apprennent à gérer seules leur budget, à faire la cuisine, à s’occuper de leurs démarches.
Le choix du métier d'aide-soignante
En 2015, Aïda obtient son bac. Elle monte, épaulée par son éducatrice référente, un dossier pour obtenir un contrat jeune majeur (CJM) qui lui garantit la prise en charge financière de l’ASE, sous réserve qu’elle se tienne à son projet de formation d’aide-soignante et d’entrée en foyer de jeunes travailleurs. Le CJM est accordé. Aïda passe des concours, en réussit trois sur quatre. En attendant la rentrée, elle fait différents petits boulots, aidée dans sa recherche par une bénévole en ressources humaines. Puis elle enchaîne par sa formation par alternance qui lui convient bien, et où elle ne reçoit que de bonnes appréciations.« Quel chemin parcouru ! conclut la cheffe de service éducatif. Maintenant Aïda travaille dans l’hôpital qui l’avait prise en alternance. Nous l’avons vue peu à peu s’ouvrir aux autres, accepter l’humour, s’épanouir. Si elle tâtonne encore par manque de confiance en elle, elle est mue par son envie d’avancer. »
(1) Le prénom a été changé. Les lieux et les personnes restent anonymes.
(2) Aide sociale à l’enfance.
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