Léa Falco
Société

Léa Falco, l'écologie ensemble

À 25 ans, Léa Falco est une des figures montantes de la jeunesse qui se mobilise pour la transition écologique. Membre de l’association Pour un réveil écologique, l’ex étudiante à Sciences Po croit dans les vertus du collectif et dans l’intergénérationnel pour faire bouger la société. Propos recueillis par Félix Lavaux.

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Membre de l’association Pour un réveil écologique, Léa Falco, 25 ans, est une des figures montantes de la jeunesse qui se mobilise pour la transition écologique.

Que pensez-vous de l’accord sur la sortie progressive des énergies fossiles conclu en décembre lors de la COP 28 à Dubaï ?

Le cadre de cette COP (Conférence des Nations unies sur le changement climatique, ndlr) était un peu absurde car elle était présidée cette année par le président de la compagnie pétrolière locale. Il faut aussi se rappeler que les COP restent des exercices diplomatiques. Chaque année, on parle de la COP comme d’une échéance qui va tout changer et, à la fin, on est toujours déçus par les résultats. Par nature, ces réunions diplomatiques se mettent d’accord sur le plus petit dénominateur commun. Néanmoins, grâce à cet accord sur les énergies fossiles, nous commençons enfin à entrer "dans le dur" en parlant d’éliminer les énergies qui sont à l’origine de l’effet de serre et du réchauffement climatique. Il a fallu 28 réunions internationales, mais nous avons fini par y arriver ! Le paysage se dessine très clairement maintenant. Mais n’oublions pas que, derrière les pays producteurs, se trouvent des pays consommateurs dont notre pays fait partie. La France et l’Union européenne ont maintenant un rôle à jouer en se défaisant des énergies fossiles et en permettant aux autres plus petits pays de le faire.

Vous rappelez que le changement climatique touche d’abord les populations les plus précaires, dont une partie de la jeunesse. Pourquoi ?

Parce que c’est une réalité au niveau mondial et national. À l’échelle internationale, les pays du Sud doivent faire face à ce que j’appelle la "triple perte" : de par leur mode de vie, ces pays ont très peu contribué aux émissions de gaz à effets de serre. Néanmoins, ils subissent déjà les effets du réchauffement climatique, avec les catastrophes climatiques et sociales qui vont avec. Et enfin, ils ont très peu de moyens pour financer leur adaptation au changement climatique.

Au niveau national, les populations les plus précaires sont les premières touchées par le réchauffement climatique. Par exemple, les grands ensembles périurbains sont souvent des îlots de chaleur où il y a peu d’espaces verts et des bâtiments souvent mal isolés. Et ne parlons pas des taux de pollution aux particules fines qui sont plus élevés là-bas qu’ailleurs. Cette situation est d’autant plus injuste que les plus pauvres en France sont ceux qui ont l’empreinte carbone la plus faible. Il est donc urgent de faire sortir ces populations précaires de ces dépendances à la voiture et de ces enclaves géographiques.

Pourtant, les jeunes les plus précaires ne sont pas les premiers à se mobiliser contre le réchauffement climatique. Comment expliquer ce paradoxe ?

C’est important de rappeler qu’il n’y a pas une jeunesse, mais DES jeunesses qui vivent des situations très différentes. Les jeunes engagés pour l’écologie représentent seulement une petite frange de la jeunesse : des jeunes urbains, diplômés et plutôt issus de milieux favorisés. Mais certains, comme Féris Barkat, qui porte ces questions auprès des jeunes des quartiers populaires avec son association Banlieues Climat, œuvrent déjà très bien pour l’acculturation à la transition écologique. Il prouve que la question du changement climatique intéresse les jeunes les plus précaires pour peu qu’on sache s’adresser à eux  avec des médias et des modes de communication qui les touchent. Ils subiront de manière disproportionnée les conséquences du réchauffement climatique et des crises environnementales, de la pollution à l'accès à l'eau. Les jeunes de Banlieues Climat montrent que le monde de demain se fera avec eux et qu'un projet écologique sera social ou ne sera pas.

Au mois de juin, vous avez publié un essai intitulé Faire écologie ensemble. Tout se joue dans l’engagement collectif selon-vous ?

Aujourd’hui, nous sommes coincés dans "le triangle de l’inaction" dans lequel les individus, les entreprises et l’État se renvoient la balle. Dans ce livre, je voulais expliquer que, pour briser le triangle, la transformation écologique viendrait d’abord d’une régulation organisée par les pouvoirs publics, qui mettrait les entreprises en ordre de bataille et qu’on arriverait ensuite, collectivement, toutes générations confondues, à faire émerger des formes d’écologie pour le quotidien. Car dans une société démocratique, les réussites passent par des mouvements collectifs et non par l’action d’un homme ou d’une femme providentielle. Se réunir en collectif, les jeunes et les plus âgés ensemble, est donc la meilleure manière d’influer sur le pouvoir politique pour en faire en sorte de briser ce "triangle de l’inaction". Parce que je tiens personnellement au concept de démocratie, ces pouvoirs publics que l'on somme d'agir devront d'abord être élus sur un programme écologique et social capable de convaincre. Il ne faut donc pas céder au simplisme, mais faire émerger dès aujourd'hui des initiatives qui montrent les possibles de demain, dans des engagements associatifs, professionnels, politiques, partisans... 

L’enfance de Léa Falco

« J’ai grandi à Melun, en Seine-et-Marne, en grande banlieue parisienne au bout du RER D. Mon père était électricien et ma mère s’est d’abord occupée d’élever ses enfants. Quand j’ai eu une dizaine d’années, elle a repris, à 40 ans, des études d’infirmière. Ensuite, je suis partie à Paris pour entrer à Sciences Po. J’avais des facilités à l’école donc je me laissais porter en faisant d’autres activités à côté comme des concours d’art oratoire. En allant étudier à Seattle, j’ai découvert le mode de vie consumériste des Américains et leur capacité à gaspiller l’énergie pour des choses futiles. C’est ce qui m’a donné envie de me mobiliser pour l’environnement. En rentrant en France, j’ai donc décidé de rejoindre l’association Pour un réveil écologique. »

 

Les dates clés

  • 1998 Naissance le 22 août
  • 2016 Entre à l’Institut d’études politiques de Paris
  • 2018 Rejoint le collectif Pour un réveil écologique
  • 2023 Publie Faire écologie ensemble. La guerre des générations n’aura pas lieu. Éd. Rue de l’échiquier.