Jeune fille travaillant devant son ordinateur avec un cahier
Société

Apprendre autrement en ligne

Internet et les réseaux sociaux font partie du quotidien des adolescents pour le loisir, les relations, mais aussi comme source d’apprentissage et de savoirs. Comment peuvent-ils en tirer le meilleur usage ? Éléments de réponse.

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Internet et les réseaux sociaux permettent aux adolescents d'apprendre autrement. Encore faut-il qu'ils connaissent ces "outils" d'apprentissage et de savoir et sachent bien les utiliser.

Irrésistibles et addictifs, Internet et les réseaux sociaux peuvent parfois crisper les relations enfants-parents... En 2023, les 11-12 ans passent déjà 1h49 par jour sur les réseaux sociaux (1) pour se divertir, dialoguer ou apprendre. Pour les adolescents, ce sont des sources quasi illimitées d’information, d’apprentissage, de nouvelles possibilités d’échanges et de partage. La plateforme de vidéos YouTube fait partie de leur favorites, Instagram et TikTok sont plébiscités. Tendance de fond qui s’amplifie depuis le confinement, des professeurs et des professionnels utilisent ces mêmes médias pour partager savoirs, savoir-faire, passions, mais aussi débusquer les approximations et fausses informations

Un apprentissage informel et étayé


Face à la profusion des informations en ligne, comment conseiller les adolescents ? Yann Bouvier, alias YannToutCourt, professeur d’histoire-géographie et de géopolitique, en fait un outil pour attiser leur curiosité, déboulonner les idées reçues, resituer les faits historiques au cœur de mini-vidéos aussi pédagogiques qu’accessibles, via TikTok et YouTube. Il sensibilise ainsi à la rigueur et à la nuance. « Chacun doit construire son savoir et son esprit critique. Je puise mes informations dans des ouvrages d’historiens reconnus, lis des articles dans divers médias fiables, souligne-t-il. J’utilise le conditionnel en relevant l’incertitude quand elle existe. J’incite mon public à acquérir le même réflexe. » 
Une approche partagée par Jean-François Rouet, directeur de recherche au CNRS, qui l’accompagne d’une mise en garde concernant les influenceurs, légion sur les réseaux sociaux, en particulier pour les 11-15 ans : « En apparence, les contenus des influenceurs sont gratuits. En réalité, ceux-ci se rémunèrent avec des publicités plus ou moins déguisées pour des marques qui incitent à consommer (2). Internet et les réseaux sociaux sont autant de manières d’interroger le monde qui nous entoure, d’apprendre à le connaître, en recueillant une masse d’informations. Encore faut-il s’assurer de leur actualité et de leur véracité ! » 

L’inattendu et le plaisir

Apprendre de façon ludique ce qui pourrait paraître être rébarbatif - l’orthographe, la grammaire, la conjugaison - c’est l’objectif que s’est fixé Adeline Dupuy, alias MaitressAdeline, professeure des écoles. Avec plus de 4,5 millions d’abonnés sur TikTok, Instagram, Facebook et YouTube, elle touche un public multigénérationnel. De sa plus belle écriture, elle décortique tout, exemples et moyens némotechniques à l’appui. « Je dépoussière les dictionnaires, les Bescherelle, le Grevisse (3), et je synthétise la règle en une fiche simple, résume-t-elle. Le plus souvent, je réponds aux questions de mes abonnés qui m’écrivent en retour avoir compris la règle en une minute ! Enfant dyslexique, j’aurais aimé disposer de ces petites astuces, pour comprendre et mémoriser les subtilités du français, apprendre par le jeu et développer mon imaginaire. » 
D’autres professionnels, parfois des amateurs passionnés, explorent des domaines à l’infini, disponibles en ligne : horticulture, mécanique, musique, cuisine, philosophie, sciences...
Pour s’y retrouver dans la jungle des contenus comme dans l’évolution des outils numériques, il est nécessaire de rester ouvert et vigilant. « Chacun doit interroger ses sources : qui le dit ? Pourquoi ? Sur la base de quelles connaissances ? » conclut Jean-François Rouet. Pour acquérir savoir et savoir-faire, gagner en confiance en soi et autonomie. 

(1)    Baromètre Born social 2023 réalisé par l’agence Heaven en partenariat avec l’association Génération numérique  
(2)    La loi du 9 juin 2023 encadre ces pratiques pour limiter les dérives
(3)    Ouvrage de grammaire de référence

2 QUESTIONS À

Jean-François Rouet, directeur de recherche au CNRS, centre de recherches sur la cognition et l’apprentissage (CeRCA), Université de Poitiers

Comment les adultes peuvent-ils accompagner les plus jeunes dans leur utilisation d’Internet et des réseaux sociaux ? 

L’adulte doit s’intéresser à ce qui se passe sur le téléphone ou l’ordinateur d’un enfant comme d’un adolescent, car ils ont besoin de temps et d’une aide bienveillante pour maîtriser ces outils et leurs contenus. Cet accompagnement évite que des relations toxiques se développent entre le jeune et son dispositif numérique. Il favorise également le dialogue et le temps des questions-réponses. Les adultes peuvent également montrer l’exemple et y passer moins de temps. 

Quelles sont vos recommandations concernant ChatGPT ?   

L’intelligence artificielle est un domaine de recherche depuis des années. ChatGPT a été développé par OpenAI, une société américaine, qui génère en temps réel du texte, de l’image, du son. Cela peut inciter un adolescent à ne plus chercher l’information ailleurs et à se reposer sur lui. Il est essentiel d’apprendre aux jeunes comment ChatGPT fonctionne pour en faire bon usage. À l’heure actuelle, ChatGPT ne donne aucune de ses sources. Il peut même en générer des fausses. En fait, il a été créé pour générer du probable. Ne fantasmons pas sur ces "savoirs"

À Apprentis d’Auteuil

Les outils numériques, leurs avantages et leurs limites font l’objet de nombreux échanges et de partage de pratiques à Apprentis d’Auteuil. Les jeunes ont besoin de repères pour utiliser à bon escient le matériel informatique, naviguer sur Internet et les réseaux sociaux, comprendre la réalité des algorithmes addictifs...
Pour accompagner les pratiques numériques des jeunes, le numérique pédagogique se développe, avec, à la clé, le déploiement d’une plateforme, l’évaluation et la recherche sur la réalité virtuelle, la sensibilisation des jeunes aux risques numériques, ainsi qu’aux familles, des formations spécifiques proposées aux professeurs et aux éducateurs. Des événements, dont Les Floralies du numérique, sont régulièrement organisés. 
 

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