Formation et insertion
30 juillet 2016

Le travail d'une éducatrice en résidence sociale

Noémie Bailli est éducatrice spécialisée à la résidence sociale Saint-Bruno de Vaulx-en-Velin, dans le Rhône. Paroles d’une travailleuse sociale enthousiaste.

En quoi consiste votre mission ?

J'assure le suivi des résidents, en lien avec mon collègue chargé de l’animation éducative. Avec ces jeunes adultes fragilisés qui nécessitent un accompagnement particulier, il faut avant tout établir la confiance, ce qui peut parfois prendre du temps. Une fois ce cap franchi, je réponds aux difficultés des uns et des autres en leur permettant d'avancer dans leurs projets de vie.

Quelle est votre formation ?

Je suis tombée très jeune dans la "marmite" du travail social, puisque mon père est éducateur. Mon bac en poche, je suis passée par un des centres de préformation d’Apprentis d’Auteuil, pour vérifier ma vocation, avant de rejoindre le Centre régional de formation aux métiers de l'éducation spécialisée de Buc, dans les Yvelines. J’ai obtenu mon diplôme d'éducatrice spécialisée en 2005 et j’exerce à la résidence sociale Saint-Bruno depuis la même année. Un poste se créait. 

Et le profil des résidents que vous accueillez ?

Ce sont de jeunes adultes à revenu modeste, homme et femme, âgés de 18 à 25 ans, célibataire, en couple, mamans seules enceintes ou avec enfant(s), parfois pères seuls avec enfant(s). Ils sont orientés vers nous par des partenaires extérieurs et restent en moyenne 14 mois dans les murs, avant un départ vers un logement de droit commun,  un laps de temps somme toute très court. La condition pour les accepter, c’est qu'ils aient un montant de ressources minimum pour pouvoir payer leur logement. On tient également compte de leurs antécédents et de l'urgence de certains cas, en lien avec les travailleurs sociaux qui nous les envoient. 

A quoi ressemblent les lieux ? 

La résidence est une ancienne maternité réaménagée il y a une dizaine d'années. Elle est à taille humaine, avec 29 logements offerts à la location pour un total de 45 personnes.  Un  gros avantage !  Ici, tout le monde se connaît et il existe une vraie solidarité, particulièrement entre les jeunes mamans, avec une réelle atmosphère  familiale. A force de frapper à la porte de leurs voisines de chambre pour leur demander de l'aide, au départ matérielle, elles deviennent très vite copines, voire pour certaines de véritables amies qui se serrent les coudes  ! Sinon, la maison est particulièrement animée le soir, mais revers de la médaille, nous avons en permanence une liste d'attente de 3 à 5 personnes ! Nous avons tous les jours des appels et nous devons malheureusement refuser du monde. 

Comment se déroulent vos journées ?

Au quotidien, j'essaie de valoriser les résidents et de les responsabiliser au maximum, tout en veillant  à ce qu'ils ne s'attachent pas  trop au lieu,  par nature  transitoire... Comme tous mes collègues exerçant en résidence sociale, j'avance avec eux selon quatre axes de travail essentiels  : le logement, la santé, l’insertion et la culture. Sans oublier la gestion des budgets et le travail sur la parentalité, mené avec des partenaires extérieurs. La porte de mon bureau est toujours ouverte. Les résidents passent me voir quand ils le souhaitent, sans formalité. On se retrouve aussi régulièrement autour d'ateliers, à la cuisine... En fait, je fixe très peu de rendez-vous. Le suivi se fait ainsi de manière  informelle, presque sans en avoir l'air. Dans ma mission, je suis également très aidée par les anciens qui reviennent  prendre des nouvelles, continuer à faire le lien ou partager des repas. C'est un réseau très puissant.

Et avec vos collègues ?

Nous travaillons beaucoup en équipe. Un atout précieux pour avancer, sans oublier des temps réguliers de relecture de notre pratique professionnelle, autour d'un psychologue, pour parler ensemble des cas les plus difficiles. Et voir comment ces situations nous renvoient parfois à nos propres impuissances.
Avec mes collègues, éducateur, chargée du suivi des anciens, directeur et autres professionnels intervenant sur le site, nous nous attachons aussi  beaucoup à promouvoir l'échange, l'entraide et le vivre ensemble entre les résidents. Nous faisons vraiment tout pour que les uns et les autres se rencontrent dans leurs diversités.

C’est un métier difficile ?

Nous accueillons des jeunes gens et des jeunes femmes aux parcours de vie parfois déjà très compliqués ! Certaines mères célibataires arrivent par exemple à la résidence sociale enceintes et rejetées par leurs proches. Dans ce cas, la priorité avec elles, c’est de les accompagner jusqu'à la naissance de leur enfant et d'assister  à leur accouchement, avant de les remobiliser sur leur orientation professionnelle. Il nous arrive aussi de recevoir certains couples  du genre plutôt  explosifs... D'une manière générale, je dirais que je suis régulièrement confrontée à la violence. Les risques dans le métier, ce sont le stress, la fatigue, l’usure... Il faut être très motivé, empathique, bienveillant. Tout en  ne se laissant pas noyer ou emporter par certaines situations. Savoir parfois dire non fermement est tout aussi  important ! Mais ceci n'est pas l'essentiel et je voudrais insister davantage sur les joies que me procure l'exercice de  mon métier. Côtoyer tous les jours ces hommes et ces  femmes me donne le sentiment d'être réellement utile, et par les situations qu'ils  traversent, tous forcent vraiment mon admiration. Je suis très heureuse de travailler à la résidence Saint Bruno !