Formation et insertion

Contrat d'engagement jeune : du nouveau pour les jeunes loin de l'emploi

En France, trop de jeunes âgés de 18 à 25 ans sont sans emploi, ni en études ou en formation. Pour les accompagner dans leur insertion sociale et professionnelle, le gouvernement lance le Contrat d’engagement jeune (CEJ). Dans la lignée des dispositifs mis en œuvre par Apprentis d’Auteuil pour les jeunes les plus éloignés du monde du travail. Explications.

Alexandra, accompagnée par Réussir Angers, dispositif d'insertion d'Apprentis d'Auteuil (c) DR
Alexandra, accompagnée par Réussir Angers, dispositif d'insertion d'Apprentis d'Auteuil (c) DR

« Les études n’ont jamais été mon truc, reconnaît Alexandra, 21 ans. J’ai redoublé deux fois la terminale sans obtenir le bac littéraire. Orientée vers Réussir Angers (1) par la mission locale, j’ai fait des tests et différents stages pour trouver ma voie. Aujourd’hui, je suis aide-monitrice-éducatrice dans un institut médicoéducatif à Angers, en parcours emploi compétences. Et je veux préparer le diplôme d’éducateur spécialisé. »
« Orphelin, je voulais travailler pour ne plus dépendre financièrement de ma sœur, confie Yann, 22 ans. Avec les formateurs de Réussir Angers, en explorant plusieurs voies par des stages, j’ai appris à ne pas me décourager. J’ai obtenu un CDI de préparateur de commandes chez Leclerc, avec la promesse de monter en grade. »
À travers leurs témoignages, Alexandra et Yann illustrent la difficulté pour les 18-25 ans de trouver seuls une formation, un stage ou un contrat en alternance et d’accéder au monde du travail. Ces jeunes ni en emploi, ni en études ni en formation dénommés NEET (acronyme de l’anglais « neither in employment nor in education or training ») sont souvent sans ressources financières, sans réseau familial, social ou professionnel. La France compte aujourd’hui 1 million de NEET dont 500 000 sont inactifs ou écartés du monde du travail depuis plus d’un an.

Un accompagnement plus exigeant

Pour eux, le gouvernement a lancé en 2015 la Garantie jeunes. Elle accompagne vers l’emploi ou la formation les 16-25 ans et fait bénéficier les jeunes en situation de précarité ou ponctuellement dans le besoin d’une allocation maximale de 497 euros par mois. Les jeunes signent pour cela un contrat de 9 à 12 mois (18 mois sous conditions) avec la mission locale.
Avec le Contrat d’engagement jeune (CEJ) applicable à compter du 1er mars 2022, l’État cherche à tirer les enseignements de la Garantie jeunes et à la refondre dans un accompagnement plus exigeant et intensif.
Le CEJ cible les NEET âgés de moins de 26 ans qui souhaitent s’engager activement dans un parcours vers l’emploi, et ce, quelles que soient les difficultés (précarité, rupture avec les institutions, dont l’école, problèmes de santé, de mobilité, etc.).
Tout au long du CEJ (de 6 à 12 mois, voire 18 mois sous conditions), chaque jeune est accompagné par un référent unique de 15 à 20 heures par semaine dans une activité : stage ou immersion en entreprise, service civique, contrat en alternance, formation qualifiante, etc., jusqu’à ce qu’il soit durablement inséré. Une allocation mensuelle pouvant aller jusqu’à 500 euros est accordée à celui qui ne peut subvenir à ses besoins quotidiens. Une application sur smartphone est également créée pour faciliter les échanges avec le référent, l’accès aux offres de stages, d’alternance, d’emploi et aux aides financières.

Du temps pour lever les freins à l'insertion

Yann, accompagné lui aussi par Réussir Angers, vient de décrocher un CDI de préparateur de commandes chez Leclerc (c) DR
Yann, accompagné lui aussi par Réussir Angers, vient de décrocher un CDI de préparateur de commandes chez Leclerc (c) DR

« En lançant le CEJ, le gouvernement comprend que, même si l’économie rebondit depuis mai 2021, que de nombreux jeunes ont retrouvé le chemin de l’emploi, d’autres, peu ou pas qualifiés, restent sur le bord de la route, explique Jonathan Tetas, responsable Plaidoyer et Relations institutionnelles. Ils ont besoin d’être accompagnés dans leur vie personnelle et professionnelle. »
« Apprentis d’Auteuil accompagne ces jeunes qui, à un moment donné, ont été fragilisés par la vie, enchaîne Hélène de Castries, chef de projet au Pôle insertion socioprofessionnelle des 16-30 ans. Décrocheurs scolaires, en situation personnelle compliquée, ils doivent avant tout se reconstruire. La plupart ont peu ou pas travaillé, et sont vraiment démunis, ne sachant souvent ni quoi faire ni comment faire. »
Au quotidien, des éducateurs, des formateurs, des chargé(e)s d’insertion sociale et professionnelle les aident à lever les freins à l’insertion : logement, accès aux soins, mobilité, démarches administratives, etc. Parallèlement, ils travaillent avec eux les savoir-être et faire, proposent la découverte de métiers via des stages en entreprise. Avec comme objectif prioritaire : développer les talents, l’autonomie de chacun et faciliter son parcours vers le monde du travail.
« À travers tous nos dispositifs de remobilisation et d’insertion – Pro’pulse prépa-apprentissage, Boost, Skola, Impact jeunes - chaque jeune doit, en fonction de ses attentes et de ses besoins, trouver la solution qui lui convient, souligne Hélène de Castries. Si ce n’est pas le cas, Apprentis d’Auteuil l’accompagne vers d’autres dispositifs, en lien avec des partenaires. Et reprend régulièrement contact pour s’assurer que son insertion s’inscrit dans la durée. »

La contribution d'Apprentis d'Auteuil au CEJ

Acteur majeur de l’insertion sociale et professionnelle des 16-30 ans, Apprentis d’Auteuil a été consulté par le ministère du Travail et le Haut-commissariat aux compétences pour contribuer aux grandes lignes du CEJ et aux modalités de mise en œuvre. « Avant de viser l’emploi, le CEJ doit aussi s’intéresser à la personne pour placer ses besoins au cœur de l’accompagnement - sans limitation de durée - et la rendre au final autonome, remarque Jonathan Tetas. Cela demande du temps ! Car il s’agit de remobiliser et d’accompagner un jeune au moment de sa vie où il en a le plus besoin. »
D’ici à janvier 2022, date du lancement expérimental du CEJ, le gouvernement doit préciser le public cible, la répartition des tâches entre acteurs dans le suivi des jeunes, la transition avec les accompagnements existants, les modalités de financement du CEJ et sa durée de vie après 2022. « Aujourd’hui, je suis mon propre chemin et j’ai une envie de réussir énorme, conclut Alexandra infiniment reconnaissante. Je voudrais dire aux hommes politiques qu’un jeune en galère ne peut pas tout prévoir à l’avance. Il a besoin de temps, de confiance, de reconnaissance. Mais dès qu’il a découvert ses qualités et ses talents, il fonce ! »

(1) Créé en 2014, Réussir Angers est un dispositif de remobilisation des 18-30 ans en grande difficulté d’insertion. En cinq mois, ils reprennent confiance en eux et s’insèrent dans le monde du travail et la société.