Education et scolarité
03 juin 2020

Les Français et la générosité en temps de crise sanitaire

Comment la générosité des Français se manifeste-t-elle en ces temps troublés de crise sanitaire ? Quel impact aura-t-elle à plus long terme ? C’est sur cette thématique qu’Apprentis d’Auteuil s’est penché dans sa dernière enquête menée par l’institut de sondage IPSOS. Décryptage des résultats.

« La solidarité à l’épreuve du coronavirus », tel est le titre de l’enquête qu’IPSOS a menée pour Apprentis d’Auteuil auprès d’un échantillon représentatif des Français, et en particulier, de ceux qui disposent de hauts revenus.
L’enquête balaie des champs très divers : de la générosité durant le confinement, en passant par les gestes solidaires plébiscités par les Français, sans oublier une réflexion plus large sur le devenir de la générosité en France. Cette crise va-t-elle en effet modifier les habitudes des Français, aura-t-elle un impact à court et moyen terme ? Quelle part les hauts revenus souhaitent-ils prendre dans cet élan de générosité ? Enfin dernier point majeur sur lequel cette enquête fait la lumière, les Français sont-ils au courant de dispositifs fiscaux incitatifs, tels le relèvement du plafond du fameux amendement Coluche ? 

Un élan de générosité

La crise aura révélé un élan de générosité sans pareil, sous diverses formes. 65 % des Français ont eu envie d’être plus solidaires. Et de fait, ils ont eu environ 2,3 gestes solidaires durant la période du confinement. Depuis le début de l’année 2020, plus d’un Français sur quatre a effectué un don à un organisme caritatif (26 %). Près d’un sur deux compte en faire un d’ici la fin de l’année.
Stéphane Dauge, directeur de la communication et de la collecte à Apprentis d’Auteuil, souligne : « Il est encourageant de constater, dans la crise sanitaire inédite que nous traversons, qu’un Français sur quatre et près de la moitié de ceux disposant de hauts revenus, comptent augmenter le montant de leurs dons cette année par rapport à 2019. » 

Enquête solidarité et coronavirus

Cependant, seul un Français sur quatre (et parmi eux, 50 % des hauts revenus) savent que le plafond de déduction des dons aux associations, permettant de bénéficier d’une réduction de 75 % sur son impôt sur le revenu, a été relevé. Il passe de 552 à 1000 euros pour encourager les gestes de générosité pour l’année 2020.
Une mesure à faire connaître, la presse représentant le premier vecteur d’information devant l’administration fiscale ou le conseiller bancaire. D’autres dispositifs favorisant les dons à des organismes caritatifs sont également mal connus : un peu plus d’un tiers seulement des Français savent par exemple qu’ils peuvent donner des biens immobiliers, bénéficier d’une réduction de l’impôt sur la fortune immobilière (IFI) ou encore effectuer un legs. 

Gestes solidaires

 Au plus fort de la crise, durant le confinement, de nombreux gestes solidaires sont venus soutenir les plus fragiles, les personnes engagées dans la lutte contre le Covid-19 ou celles qui ont pu travailler pour ravitailler la population en biens de première nécessité. Les Français se sont mobilisés sous différentes formes.
Beaucoup ont pris des nouvelles de leur entourage et en particulier, des personnes isolées (52 %), 46 % ont remercié les caissiers et les caissières pour leur travail (ce pourcentage est encore plus fort chez les seniors : 56 % des plus de 65 ans). 33 % ont rendu visite à leurs voisins, 31 % (en particulier les Parisiens et les jeunes) ont applaudi le personnel soignant à 20 H. 16 % ont cousu des masques ou fourni du matériel pour en fabriquer. 

En revanche, les dons aux associations ou les cagnottes en ligne ont concerné seulement 10 % des Français. 9 % d’entre eux se sont porté bénévoles, ce qui a pu partiellement pallier le manque des bénévoles habituels (en général, des seniors restés confinés chez eux).  Les Français les plus aisés ont davantage fait des dons d’argent (32 % contre 10 % de l’ensemble des Français), ils ont aussi davantage maintenu le salaire des personnels travaillant chez eux (garde d’enfants, aide ménagère) : 31 % contre 6 %. Ils ont aussi donné davantage de la nourriture ou du matériel pour les soignants (20 % contre 6 %).

À quoi pourrait ressembler le monde d’après ? 

 C’est un des points saillants de l’enquête. Une grande majorité de Français pensent que de nombreuses catégories de la population vont être gravement touchées par les conséquences de la crise sanitaire, toutes générations et catégories sociales confondues : 92 % des commerçants, 75 % des salariés, 79 % des jeunes de 18 à 25 ans sans emploi ni formation. Malgré ce constat, ils ne sont que 28 % à penser que le monde d’après sera plus solidaire. Les plus optimistes étant les jeunes (56 % des moins de 26 ans) et les hauts revenus (43 %). Malgré tout, 65 % de nos concitoyens déclarent que la crise leur a donné, à titre individuel, l’envie d’être plus solidaire.  80 % d’entre eux placent l’État en tête des contributeurs majeurs à la construction du monde de demain, devant les entreprises (64 %) et les citoyens (62 %). À noter, le rôle crucial que les Français attribuent aux associations : 84 % considèrent qu’elles joueront un rôle primordial.   Cette analyse de la situation conduit les Français à déclarer vouloir aider leur entourage (74 %), et plus par des dons en nature (54 %) que des dons d’argent (44 %), sauf chez les hauts revenus qui déclarent à 76 % leur intention de donner. 

Quel impact sur les dons ? 

La grande inconnue pour le secteur caritatif est l’engagement futur des Français, afin de pallier les conséquences désastreuses de la crise sur les plus fragiles, les jeunes et les familles en difficulté en particulier. L’enquête révèle que le pourcentage de Français souhaitant donner en 2020 reste le même qu’en 2019 (51 %), mais, fait notable, la part des hauts revenus augmente de 5 points, passant à 82 % En ce qui concerne le montant escompté, il sera le même pour 52 % des Français. 25 % d’entre eux compte donner plus, voire, beaucoup plus (3 %). Les hauts revenus sont près de la moitié à vouloir donner plus (49 %) ou beaucoup plus (15 %). Pour rappel, le don moyen annuel est de 300 euros pour l’ensemble de la population française, 2140 euros pour les hauts revenus. Les domaines préférés des Français sont la santé et la recherche médicale (39 %), devant l’aide aux personnes démunies (27 %), l’environnement (27 %) et la défense des animaux (23 %). L’enfance et l’éducation représente 20 % des intentions de dons, 34 % pour les hauts revenus.  « Les Français sont convaincus que l’impact économique et social de cette crise sera considérable et ils ont raison, explique Stéphane Dauge. Nous le constatons depuis le début, les familles précaires ressortent encore plus fragilisées, le nombre de décrocheurs scolaires est de plus en plus élevé, et l’insertion des jeunes s’annonce comme le défi le plus important qu’il faudra relever. Sur tous ces sujets, les équipes d’Apprentis d’Auteuil restent plus que jamais mobilisées. »